Quel est le « jour du Seigneur » mentionné dans l’Apocalypse 1:10? Acceptez-vous l’interprétation des Adventistes du Septième Jour, qui le voit comme le Sabbat du septième jour?

L’expression « jour du Seigneur » trouvée dans l’Apocalypse 1:10 a été interprétée de quatre différentes façons. Pour mon traitement élaboré de ces différent points de vue, veuillez consulter mon livre Du Sabbat au Dimanche, traduction française de Dominique Sébire (P. Lethielleux, Paris 1984) pp. 95- 111. Par brièveté, je résumerai succinctement, dans ce contexte, les quatre interprétations majeures.

Le Dimanche.

L’interprétation courante de l’expression « jour du Seigneur » est le Dimanche. Cette interprétation est basée, non pas sur l’évidence interne du livre de l’Apocalypse, mais sur trois témoignages patristiques du deuxième siècle: Didache 14, 1, l’Epître aux Magnésiens d’Ignace (9, 1) et l’Évangile selon Pierre, 35, 50. De ceux-ci, c’est seulement que dans l’Évangile Apocryphe selon Pierre, qui est daté la dernière moitié du deuxième siècle, que le Dimanche est sans aucun doute désigné par le terme technique « du Seigneur— cyriacè ». La désignation du Dimanche comme « le jour du Seigneur » qui, sans aucun doute, apparaît avant la fin du deuxième siècle, ne peut pas être lu dans l’Ap 1:10, avant cette date. Une raison majeure est que si le Dimanche avait déjà reçu la nouvelle appellation « jour du Seigneur » à la fin du premier siècle, quand l’Évangile de Jean et le livre de l’Apocalypse furent écrits, nous nous attendrions à ce que cette nouvelle expression pour le Dimanche soit employée constamment dans les deux travaux, spécialement puisqu’ils furent apparemment produits par le même auteur, à peu près en même temps, dans la même zone géographique.

Si un nouveau terme s’impose et est immédiatement compris, un auteur ne confond pas ses lecteurs en utilisant des expressions archaïques. De plus, si la nouvelle dénomination « jour du Seigneur » existait déjà pour exprimer la signification et la nature du culte chrétien, les écrivains des évangiles auraient à peine raison d’employer l’expression juive, le « premier jour de la semaine ». Ainsi, le fait que l’expression « jour du Seigneur » apparaît dans le livre de l’Apocalypse de Jean, mais non pas dans son Évangile— où le premier jour est explicitement cité en conjonction avec la résurrection (Jn 20:1) et les apparitions de Jésus (Jn 20:19, 26)— suggère que le « jour du Seigneur » de l’Ap 1:10, ne puisse guère se rapporter à Dimanche.

Dimanche annuel de Pâques.

D’autres érudits maintiennent que le « jour du Seigneur » dans l’Ap 1:10, désigne le Dimanche annuel de Pâques plutôt que le Dimanche hebdomadaire, ordinaire. Cette conclusion repose premièrement sur l’hypothèse que puisque dans le Nouveau Testament et la littérature post-apostolique, peu d’importance est attachée au Dimanche en tant que jour de culte chrétien, le « jour du Seigneur » d’Ap 1:10, doit se référer au Dimanche annuel de Pâques, duquel le Dimanche ordinaire (hebdomadaire) par la suite se développa (en tant que jour de culte).

La grande faiblesse de cette interprétation est qu’elle ignore le fait que le livre d’Ap fut adressé par Jean aux sept églises d’Asie Mineure, lesquelles, nous savons, rejetèrent énergiquement la coutume du Dimanche annuel de la Pâque, tenant solidement, au lieu, à la date de la Pâque du 14 Nisan. Comment Jean pourrait-il mentionner «  Je fus (ravi) en esprit au jour du Seigneur » quand il écrivit aux Chrétiens qui, nous savons, seraient plutôt excommuniés par l’Évêque Victor de Rome, que d’accepter le Dimanche annuel de Pâques pour célébrer la Pâque?

Le Sabbat du septième jour de la semaine.

Un troisième point de vue, tenue par les Églises qui observent le Sabbat du septième jour de la semaine, y comprenant les Eglises Adventistes du septième jour, maintiennent que le « jour du Seigneur » de l’Ap 1:10, désigne le Sabbat du septième jour de la semaine. Cette conclusion est basée particulièrement sur le fait que le Christ se déclara Lui-même le «  Seigneur aussi du Sabbat » (Mc 2:28D).

Tandis qu’on doit admettre que d’une façon conceptuelle il y a une connexion entre « Seigneur du Sabbat » et « jour du Seigneur », linguistiquement, c’est difficile à défendre cette interprétation parce que l’expression « jour du Seigneur » n’est jamais utilisée dans la plus ancienne littérature chrétienne en tant que désignation du Sabbat du septième jour.

Historiquement, les Adventistes du septième jour ont interprété le « jour du Seigneur » de l’Ap 1:10, pour référee au Sabbat du septième jour. Ellen G. White exprime ce point de vue, disant par exemple: « Le jour du Seigneur est le septième jour, le Sabbat de la création. Ce jour que Dieu sanctifia et bénit, le Christ sconfia « par Son ange, à Son serviteur Jean, les choses qui doivent arriver avant la fin de l’histoire du monde ».[1]

Encore elle écrit: « Ce fut au Sabbat que le Seigneur de gloire apparut à l’apôtre exilé. Le Sabbat fut aussi respectueusement observé par Jean sur Patmos, comme quand il le prêchait au peuple dans les villes et cités de la Judée ».[2]

Personnellement j’accepte cette interprétation, spécialement depuis que j’ai montré dans ma dissertation Du Sabbat au Dimanche, qu’il y a des indications convaincantes que l’observation du Dimanche n’a pas son origine avant le règne de l’empereur Hadrien (117-138 apr. J.-C). De plus, il y a aussi des indications que même quand le Dimanche fut introduit par l’Église de Rome, beaucoup de Chrétiens de l’Orient adoptèrent l’observation du Dimanche en plus que, plutôt que comme substitution au Sabbat. Ce que cela signifie, c’est que seulement le Sabbat pouvait être connu de Jean comme le « jour du Seigneur » avant la fin du premier siècle, quand il écrivit le livre de l’Apocalypse.

Malgré cette conviction, dans Du Sabbat au Dimanche, je raisonne en faveur de l’interprétation eschatologique du « jour du Seigneur », c’est à dire, comme signifiant le jour de la venue du Christ et du jugement. Je pris cette position dans ma dissertation, non pas parce qu’elle traduit mes convictions personnelles, mais simplement parce que, par son contexte et linguistiquement, elle est plus soutenable.

En recherchant, parfois une personne présente une hypothèse laquelle ne peut pas nécessairement refléter ses convictions personnelles. Dans mon cas, après avoir discrédité le Dimanche et l’interprétation du Dimanche de Pâques, j’avais besoin de soumettre une explication alternative. Pour les besoins de la discussion, je choisis de justifier l’interprétation eschatologique du « jour du Seigneur », alors même qu’il fut contraire à ma conviction personnelle, simplement parce que je sentis qu’il était, par son contexte et linguistiquement, une explication plus soutenable.

Mon but, dans ma dissertation, n’était pas d’établir si oui ou non le Sabbat était vu ou appelé « jour du Seigneur » au début du christianisme, mais plutôt que si, comme il est généralement cru, le Dimanche était appelé et observé comme « jour du Seigneur » dès le tout début du christianisme. Beaucoup de documentations et d’argumentations de ma dissertation discréditent la dernière prétention et prouvent sa fausseté.

Ma défense pour l’interprétation eschatologique du « jour du Seigneur » de l’Ap 1:10, doit être vue dans le contexte de mon but principal de ma dissertation, qui n’était pas d’établir si oui ou non théologiquement le Sabbat était le « jour du Seigneur » déjà à l’époque de Jean. La faute d’apercevoir mon but principal a malheureusement conduit quelques un de mes camarades-croyants à conclure que je n’accepte pas le Sabbat en tant que « jour du Seigneur ». Évidemment, cette conclusion est totalement fausse, parce que je crois, non seulement que le « jour du Seigneur » durant lequel Jean en sa vision, fut le jour du Sabbat, mais aussi que seulement le Sabbat peut être légitimement appelé et observé en tant que « jour du Seigneur ».

Le « jour du Seigneur ».

Une quatrième interprétation, laquelle a été défendue par des érudits distingués comme J.B. Lightfoot et A. Deissman, virent le « jour du Seigneur » de l’Ap 1:10 comme une variation du « jour du Seigneur » lequel est généralement employée dans l’Écriture pour désigner le jour de l’arrivée du Christ et de son jugement. Les raisons pour cette interprétation sont discutées en détail dans Du Sabbat au Dimanche, traduction française de Dominique Sébire (P. Lethielleux, Paris 1984) pp. 105-111.

L’appui de base pour cette interprétation est fourni par le contexte immédiat et au plus large, lesquels, tous les deux parlent du jour de l’arrivée du Christ. Un appui additionnel est fourni par l’emploi du terme « jour du Seigneur » par Origène;[3] par la référence de Jean « du grand jour de Dieu » (Ap 16:14; 6:17); et par le parallélisme unique entre l’Ap 1:10 et 4:1-7. Le parallélisme consiste de les expressions, contextes, et contenus similaires, lesquels suggèrent que le « jour du Seigneur » de l’Ap 1:10, puisse être compris à la lumière de l’expression parallèle « ce qui doit arriver par la suite » (4:7), ce qui signifie le jour du retour du Christ.

Il peut être possible de rejoindre les deux dernières interprétations en envisageant le « jour du Seigneur » comme un jour de Sabbat pendant lequel Jean en sa vision, et comme le grand jour de la venue du Christ, durant lequel Jean vit en vision. Quelle plus grande vision aurait pu donné du courage à l’apôtre âgé, qui était en exile pour son témoignage au Christ. De plus, le Sabbat est étroitement uni au deuxième avènement. L’assemblée invisible du Seigneur durant le temps du Sabbat hebdomadaire, est un prélude à la réunion du Seigneur visible dans l’espace, durant le dernier jour de son avènement.


[1] E.G. White, Testimonies for the Church (Mountain View, California, 1948), vol. 6, p. 128.

[2] E.G. White, The Acts of the Apostles (Mountain View, California, 1911), p. 581.

[3] Origène, Commentary on St. John 10:35: “When all these things will be resurrected in the great Lord’s day.”

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