La vie livrée

Notre Dieu est un Dieu d’amour tendre, fervent, inaltérable et illimité Et parce qu’il est un Dieu d’amour illimité, il est digne d’une confiance illimitée. sa volonté est certainement parfaite à l’égard de ses enfants. Aussi parfaite quand le chemin est rude, pénible et ténébreux, que quand il est doux, aisé et lumineux. Alors accordons-lui la confiance et la soumission parfaite que cette foi réclame.

La plénitude de Christ

Il n’y a jamais eu dans les siècles passés, une aussi grande préoccupation de ce que doit être la vie chrétienne, que de nos jours. Les vrais enfants de Dieu soupirent après la plénitude de Christ, que la plupart des chrétiens réalisent si imparfaitement. La Parole de Dieu la promet, les premiers disciples l’ont glorieusement révélée, les âmes vivantes s’y cramponnent, et leur foi en la possibilité d’une telle vie provient du St-Esprit. Voyant qu’il ne peut pas bannir des cœurs cette vision des hauts sommets, le grand adversaire cherche à obstruer le passage qui y conduit. L’erreur, l’enseignement falsifié de la Parole, le perfectionnisme, la sanctification de la chair, l’ignorance et bien d’autres causes s’accumulent pour empêcher l’âme d’atteindre ce but, comme le mirage et le brouillard empêchent le pèlerin d’arriver au terme de son voyage. A travers tous ces obstacles, l’Esprit discerne et retrouve le chemin, de sorte qu’au milieu même des ténèbres des derniers siècles, il a maintenu la conception de la vie de plénitude en Christ.

Aussi longtemps que les hommes errent dans le labyrinthe de leurs propres pensées et recouvrent la vérité du pauvre vernis de leur sagesse humaine, l’Esprit ne peut rien leur révéler. Mais aussitôt qu’ils rendent à la Parole de Dieu sa simplicité et sa suprême autorité, la vraie lumière jaillit et l’étude sérieuse et véritable de la Bible dévoile le secret d’une pleine et abondante vie en Jésus.

Notre corps est le temple du St-Esprit qui entre en nous à la conversion, pour habiter éternellement en nous. Le mobile de la vie de puissance est de marcher selon l’Esprit, au lieu de marcher selon la chair (Rom 8:5). Et pour marcher selon l’Esprit, il est absolument nécessaire de livrer à Dieu ces vies que nous avons jusqu’ici dirigées nous-mêmes. Ces glorieuses vérités sont clairement expliquées dans la Parole de Dieu, spécialement dans les épîtres de saint Paul.

Si nous marchons par l’Esprit, nous ne péchons pas (Gal 5:16). Si nous marchons par l’Esprit, nous faisons mourir les actions du corps (Rom 8:13).

Si nous marchons par l’Esprit, la loi de l’Esprit de vie nous affranchit de la loi du péché et de la mort (Rom 8:2).

Si nous marchons selon l’Esprit, nous sommes fils de Dieu (Rom 8:12).

Si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes plus sous la loi (Gal 5:18).

 

Si nous marchons selon l’Esprit, nous sommes transformés à l’image de Christ, de gloire en gloire (2 Cor 3:18), et l’image de sa glorieuse vie est reproduite en nous dans tous ses traits d’amour, de joie, de paix, de longanimité, de bienveillance, de bonté, de fidélité, de douceur, de tempérance (Gal 5:22).

En un mot, celui qui réalise la marche de l’Esprit marche en Dieu, au lieu de marcher par lui-même ; pour lui, vivre c’est Christ.
  • La consécration de notre vie est nécessaire pour que Dieu puisse agir librement en nous. Comment le St-Esprit peut-il conduire, purifier, transformer, remplir et employer une vie, avant qu’elle lui soit complètement livrée ?
  • Que peut faire le potier avec une argile qui n’est pas maniable ?
  • Comment Dieu peut-Il façonner un être qui pleure et qui gémit sur chaque idole qu’on lui enlève, qui se désespère pour chaque affliction nécessaire, qui oppose sa volonté hostile aux coups de ciseau du divin sculpteur ?
  • Comment peut-il mouler, transformer, bénir ?

Certainement le navire dont Dieu n’est pas le pilote est destiné à faire naufrage.

Certainement la harpe qu’il n’a pas accordée ne rendra jamais que des sons discordants et confus. Si nos montres ont besoin de réparation, nous les donnons à l’horloger ; si nos bijoux se brisent, nous les portons au bijoutier ; si nous avons un membre cassé, nous le confions au chirurgien. Pouvons-nous refuser à Dieu de lui remettre cette vie rachetée à un si grand prix, pour qu’il réponde à nos aspirations les plus élevées ? C’est pour cela que la Parole de Dieu nous presse de céder, de céder encore, de céder toujours, de nous livrer nous-mêmes à Dieu (Rom 6:13, 16, 19 ; 12:1), si nous voulons que son Esprit ait libre cours dans nos vies. Son dessein de grâce, de bénédiction, et le ministère qu’il confie aux siens est complètement anéanti pour celui qui ne veut pas se livrer à lui.

Considérons la vie de Jésus-Christ. Rien n’est plus frappant que son attitude d’absolue soumission à son Père :

«Me voici, je suis venu pour faire ta volonté» Héb 10:9).

Il est venu, comme il le dit lui-même, non pour faire sa propre volonté, non pour dire ses propres paroles, non pour chercher sa propre gloire, non pour enseigner ses idées. Dans toutes ces choses, il proclamait son entière soumission au Père, son renoncement complet au moi pour la direction de sa carrière terrestre. Et, s’il est vrai que le serviteur n’est pas plus que son maître, comme le Père l’a envoyé, ainsi il nous a de même envoyés. Et, si lui, le Fils de Dieu, sans tache et sans péché, a livré sa vie terrestre à son Père, à bien plus forte raison nous aussi devons-nous lui livrer nos vies.

A chaque page du divin livre nous sommes exhortés à suivre les traces de Christ, et qui voudrait s’en dispenser ? Le désir de porter des fruits pour lui, n’est-ce pas un mobile suffisant pour nous presser d’imiter Jésus, et de nous donner à Dieu sans réserve ? Plusieurs de ceux qui sont sauvés ne sont pas serviteurs ; ils se réjouissent de leur salut, mais ils redoutent la mission de disciple ; ils convoitent la couronne, mais ils repoussent la croix. Pendant que nous n’étions que pécheurs, Christ est mort pour nous (Rom 5:8). Il est mort pour que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort pour eux (2Cor 5:15). Dans le premier passage, ces âmes voient le dessein de Christ de sauver, mais elles ne voient pas dans le second le dessein de Christ en nous sauvant.

Elles ne voient pas qu’il est mort, non seulement pour sauver notre vie, mais afin de l’employer pour lui, non seulement pour amener des hommes dans son royaume, mais pour en faire des serviteurs du Roi. Il ne se contente pas de pécheurs sauvés, il lui faut des saints consacrés.

Le fait le plus étonnant de la religion de nos jours, c’est le grand nombre d’hommes et de femmes qui, sauvés par Christ, refusent de se livrer à Christ pour vivre pour lui. Ceux qui répondent de tout leur cœur avec joie à l’appel divin sont en aussi petite minorité dans nos églises que les inconvertis qui reçoivent l’Évangile. Quel mépris de l’amour de Jésus, quelle révélation du règne du moi !

Comment la vision bénie du sacrifice de Christ ne nous presse-t-elle pas de nous jeter à ses pieds avec tout ce que nous possédons, au lieu de lui marchander à regret les dons parcimonieux de notre abondance. Aucune vérité de la Parole de Dieu n’a souffert autant de contradictions que cet, appel à une vie livrée, aucune n’a été plus souvent dénaturée par ceux qui se disent chrétiens. Elle a été affligée du douloureux insuccès de ses messagers et de l’inconcevable légèreté de ceux qui parlaient de la consécration comme d’un vain mot, et des réunions de consécration le sourire aux lèvres.

Malgré tout, cette vérité reste là comme l’acte suprême de la vie du croyant, comme le principe d’un service plein de succès et de bénédictions. Beaucoup d’enfants de Dieu se contentent de quelques actes isolés qui doivent plaire au Seigneur, et ils trouvent de la joie à le suivre aussi longtemps que ses plans leur conviennent.

Mais quand il faut marcher dans la nuit, supporter et accomplir des choses qui répugnent à leur volonté propre, ils s’arrêtent et cherchent des exceptions à la volonté de Dieu. C’est alors qu’un acte décisif de consécration est de grande valeur, car il implique la condition de faire et de souffrir tout ce que Dieu veut, en tout temps, comme étant ce qu’il y a de meilleur pour nous. Et si nous sommes appelés à marcher dans le crépuscule d’une foi simple et absolue ; si les voies de Dieu semblent douloureuses, nous le suivrons avec autant de confiance dans la nuit de la foi que dans la lumière de la vue. Nous retournerons en arrière, nous souvenant du moment où nous lui avons remis la responsabilité de notre existence ; nous nous rappellerons sa fidélité et sa puissance pour garder tous ceux qui se confient en Lui !

Laissons donc paisiblement notre vie au pied de la Croix, là où nous l’avons placée, une fois pour toutes, entre ces mains dont le sang a coulé, et qui sont parfaitement sûres pour la garder à sa gloire.

A celui qui nous a aimés et qui nous a lavés de nos péchés par son sang et qui a fait de nous un royaume de sacrificateurs pour son Dieu et Père, à lui la gloire et la force aux siècles des siècles[1] !

Amen.

Qu’est-ce que l’acte de consécration ?

Qu’est-ce que la vie livrée ? Ou plutôt, qu’est-ce que l’acte de consécration qui ouvre à Dieu la vie livrée ? Les textes cités en tête de ce chapitre répondent clairement à cette question.

La consécration, c’est le don volontaire de nous-mêmes à Dieu pour faire sa volonté au lieu de la nôtre.

Notez bien les termes, car chacun d’eux est significatif et tous sont tirés des textes ci-dessus. Un don volontaire (donnez, offrez, se sont donnés) de nous-mêmes (vous, vos corps, eux-mêmes) à Dieu (à Dieu, au Seigneur) pour faire sa volonté au lieu de la nôtre (1 Pierre 4:2). L’acte de consécration est donc :

Une offrande.

Le mot hébreu traduit par consacrer, signifie «remplir la main». Il est demandé à l’enfant de Dieu de s’offrir lui-même en témoignage de reconnaissance au Dieu qui l’a racheté, tout comme le pieux Israélite apportait en offrande à l’Éternel ce qu’il avait de meilleur, de plus riche, de plus exquis.

Dans les temps passés, quand on vendait les hommes comme du bétail, un esclave attendait en tremblant sur le marché le résultat de la surenchère qui allait le séparer de sa femme, de ses enfants et de tout ce qu’il avait eu de cher et de précieux pendant son esclavage chez son dernier maître. Une surenchère succède à l’autre. Enfin le marteau du crieur public tombe et s’arrête. Un monsieur s’avance vers l’esclave et lui dit : – «Je t’ai acheté» – «Oui, massa» fut la réponse soumise. – «Je t’ai acheté bien cher». L’esclave ne put que baisser la tête en signe d’assentiment. – «Mieux que cela, continua l’acheteur, je t’ai acheté pour t’affranchir, va, tu es un homme libre», lui dit-il en ôtant ses liens. Tombant aux pieds de son libérateur, l’affranchi, éclatant de joie, s’écrie : – «Massa, je reste votre esclave à jamais».

C’est ainsi, frères rachetés, que Christ, notre rédempteur, attend que nous tombions à ses pieds pour lui offrir la vie qu’il a affranchie. C’est ainsi que Paul, autrefois esclave du péché, prend avec joie le titre d’esclave (volontaire) de Jésus-Christ.

L’offrande de nous-mêmes est mise admirablement en relief par notre Seigneur, qui s’offrit pour faire la volonté du Père. Le passage (Héb 10:5) où il parle du corps qu’il offre à son Père est cité d’après le Ps 40:7. Là, au lieu de : «tu m’as formé un corps», il est dit : «tu m’as percé les oreilles». Quand un esclave devenait libre, mais voulait, de son plein gré, rester chez celui qu’il avait appris à aimer, il se tenait debout contre le montant de la porte, et son maître lui perçait l’oreille avec une aiguille. Dès ce moment, son oreille percée le faisait reconnaître pour un homme qui, possesseur de sa liberté, s’était volontairement engagé par amour à rester esclave toute sa vie. Par cette image, le St-Esprit nous montre d’une manière vivante la soumission absolue et entièrement spontanée de celui qui a dit de lui-même : «Je suis descendu du ciel pour faire non ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé, et je suis au milieu de vous comme celui qui sert». Voilà comment Dieu voudrait que nous, qui sommes «fils de Dieu par la foi au Christ Jésus», nous nous offrions joyeusement en sacrifice à notre Père.

Au reste, qu’aucun de ceux qui se sont ainsi offerts en sacrifice à Dieu ne doute jamais qu’il appartient à Dieu. Car tous ses enfants sont à lui bien avant qu’ils se soient offerts eux-mêmes. La consécration ne constitue pas le droit de propriété, elle la présume.

Ce n’est pas pour lui appartenir, mais c’est parce que nous lui appartenons que nous lui consacrons nos vies. C’est l’achat qui crée le droit de propriété, dont la livraison n’est qu’une conséquence nécessaire pour que la possession devienne effective.

Aussi la question n’est-elle pas : «Est-ce que j’appartiens à Dieu ? mais : est-ce que j’ai livré à Dieu ce qui lui appartient déjà ?»

Une fois que j’écrivais à un ami à ce sujet, demandant si celui qui se consacre à Dieu peut dire, sans l’ombre d’un doute, «je suis à lui». je reçus cette réponse aussi claire que brève :

«Vous êtes déjà à Dieu par droit d’achat : livrez-lui maintenant ce qui lui appartient».

Que c’est vrai et simple ! Vous ne vous appartenez pas à vous-même. Pourquoi ? Parce que vous avez été acheté. Le texte nous montre clairement que Dieu possède un titre sur nos vies, mais nous en avons encore la possession, la disposition. Notre consécration à Dieu n’est donc que l’acte par lequel nous remettons à Dieu ce qui lui appartient déjà par droit d’achat. Et nous n’avons jamais à craindre un refus ni à douter que nous lui appartenions. Cela a été réglé quand il nous a achetés. Il nous a élus en Jésus-Christ dès avant la création du monde.

Reste seule cette question : avons-nous remis ce qui a été acheté, avons-nous livré ce qui ne nous appartient plus ? Vous allez chez un bijoutier, vous achetez un diamant, vous le payez, mais vous le laissez chez lui pour le faire prendre plus tard. Le lendemain, quand vous passez, il refuse de vous le livrer. De par la loi, vous en êtes le possesseur légitime, et c’est injustement qu’il retient le bijou. C’est ainsi que Dieu, dans son amour, a dépouillé les cieux de leur plus riche trésor pour nous racheter, et pourtant nous pouvons refuser de lui livrer nos vies si chèrement payées. Cela nous amène à une deuxième pensée : la consécration est :

Un don volontaire.

Il y a une limite que Dieu ne veut pas franchir c’est celle de la liberté humaine. Il plaidera, il suppliera avec larmes à la porte du cœur qui lui refuse sa propriété légitime ; mais il n’en forcera pas l’entrée. Ce qu’il y a de plus solennel dans la consécration de notre vie, c’est que le St-Esprit nous laisse libre de céder ou de résister quand il nous a convaincus de la réalité de l’appel de Dieu. Et tandis que le Christ plein d’amour se tient devant nous et réclame la possession de nos vies, disant : «Combien souvent j’aurais voulu«, il se peut qu’il soit dit de nous : «mais vous ne l’avez pas voulu«. Oui, nous sommes capables de lever les yeux sur ce visage sanglant et de lui dire : «Seigneur, je sais que tu m’as acheté à grand prix, je sais que tu as sur moi les droits les plus élevés et les plus sacrés qui se puissent concevoir, mais je suis enlacé d’une manière inextricable dans mes plans terrestres, mes plaisirs et mes ambitions, et je ne tiens vraiment pas à te livrer ma vie».

Dans le 1er livre de Samuel, 10:27, nous lisons au sujet de Saül que des hommes pervers le méprisèrent et ne lui apportèrent point de présents ; mais il fit le sourd. C’est ainsi que notre Roi, après avoir quitté son trône dans les cieux, pris la forme d’un serviteur et donné sa vie dans la douleur et dans l’ignominie pour nous rendre participants de sa gloire éternelle, se voit souvent méprisé et renvoyé à vide, sans ce don après lequel son cœur languit : le don de nous-mêmes ! Et cependant il n’use pas de contrainte ; il ne crie pas ; il demeure tranquille. Pourquoi ? Parce que l’amour attend un mouvement d’affection volontaire et libre de ceux pour lesquels il souffre, et s’il n’en reçoit pas, il se renferme dans un silence douloureux. Ne t’attends pas, toi qui n’as pas livré ta vie à Christ, «à ce qu’il élève la voix contre toi et te commande avec véhémence de te consacrer à lui». Il y a dans l’amour une délicatesse qui ne permet pas cela. Quelle femme véritablement aimante, après avoir peiné et souffert, s’être sacrifiée pour celui qu’elle aime, ne serait pas froissée à la seule pensée d’arracher une réponse à son affection au moyen de reproches, d’allusions piquantes, de gronderies ? Le subtil instinct de l’amour attend une réponse volontaire et spontanée et souffrira en silence plutôt que d’insister. Ce qu’est le parfum pour la rose, la couleur pour le couchant, la blancheur immaculée pour la neige, la spontanéité l’est pour la consécration de nos vies. Si le sacrifice de Christ a répandu dans le monde un parfum de vie, c’est qu’il a été une offrande volontaire. Et il s’attend de notre part à une offrande de même nature. Voilà pourquoi la parole de Dieu ne nous impose pas la consécration de notre vie, mais nous tient ce langage : «Je vous exhorte, frères». C’est l’amour qui parle. Dans chaque page teinte de son sang, dans chaque verset qui relate ses souffrances, dans chaque ligne qui nous rappelle son sacrifice, c’est l’amour qui parle, et si l’amour n’éveille en nous aucune réponse, alors notre roi se tait. Car l’amour se taira plutôt que de mendier une réponse que la vue de ses souffrances devrait produire spontanément. La consécration est

Un don volontaire de nous-mêmes.

C’est de nous-mêmes que Dieu a besoin. Aucun autre don en argent, temps, travail ou talents ne satisfera les besoins de son cœur. Car Dieu est amour, et l’amour demande par-dessus tout la possession du cœur.

Ainsi la consécration est une transaction entre le Sauveur et le sauvé ; aucun autre sacrifice ne vaut ce don sacré d’une vie livrée. Il y a dans le cœur de l’homme le plus pauvre et le plus dégradé un sentiment instinctif par lequel il refuse l’argent quand c’est d’amour qu’il a besoin. Et Dieu, pourrait-il être content à moins ? L’or et l’argent, le temps, les talents, le travail, il les accepte, s’ils accompagnent le don de soi-même, mais il les refuse s’ils ont la prétention de remplacer ce don. Il est des personnes qui donneront fortune, temps et travail, mais qui ne se sont jamais vraiment livrées à Dieu dans le secret de leur cœur. Et quand elles se rendent compte que Dieu leur demande cela, elles tremblent, elles pâlissent, elles reculent. Pourtant, s’il faut que Dieu soit tout pour nous, il faut aussi que nous soyons tout à lui. La relation de confiance intime entre le Sauveur et le racheté, qui est la plus grande bénédiction de la vie du croyant, ne pourra jamais s’établir sans que nous nous livrions à celui qui s’est livré pour nous. Sans cette pleine consécration, nous ne l’avons pas reçu comme Seigneur, quand même nous le reconnaîtrions comme Sauveur. Avez-vous jamais pris garde à cette distinction ? Paul appelle Jésus «notre Seigneur Jésus-Christ». Nous connaissons Jésus : «Tu lui donneras le nom de Jésus ; car c’est lui qui sauvera son peuple de leurs péchés». Nous connaissons la paix que fait naître le pardon des péchés ; nous connaissons la victoire sur le péché ; un jour, nous nous réjouirons de savoir que le péché est disparu. Nous savons en quel Sauveur nous avons cru, nous savons qu’il est puissant pour sauver parfaitement tous ceux qui s’approchent de Dieu par lui. Comme Sauveur, jamais il ne nous abandonne dans la détresse, il n’a jamais perdu une bataille livrée pour l’âme faible qui se confie en lui. Quelque terrible que puisse être la tentation, il donne toujours le moyen d’en sortir victorieusement. En vérité, nous l’aimons avant tout comme Jésus.

Nous le connaissons aussi comme Christ, comme l’oint. Car c’est lui qui nous baptise de son Saint-Esprit, et l’onction que nous avons reçue demeure en nous et nous n’avons pas besoin que personne nous instruise. Cet Esprit-Saint, l’Esprit de Jésus lui-même, l’Esprit de Dieu, demeure en nous. Il console, il guide, il purifie, il nous donne joie, paix, amour, il nous révèle les choses de Christ, il nous transforme à son image, il nous dévoile la gloire de Christ.

Mais ce même Fils de Dieu que nous confessons comme notre Sauveur et dont nous avons reçu l’onction, l’acceptons-nous comme le Seigneur (ce qui signifie Maître), le propriétaire de notre personne, le maître qui dispose d’un droit absolu et permanent, par le fait du rachat qu’il a opéré ? Bien-aimés, Jésus-Christ est-il notre Seigneur dans toute l’acception du terme ? Avons-nous joyeusement mis à sa disposition nos corps, nos vies, tout ce dont nous disposons ? Ou bien avons-nous accepté les privilèges de la rédemption, le pardon, l’onction sainte, sans reconnaître le droit de Seigneur et de Maître que son œuvre lui confère ? Est-ce qu’il dispose de vous, de votre or, de votre argent, de vos affections, de vos pensées, de votre temps, de vos talents ? Comment serait-il possible d’appeler Jésus Seigneur dans ce sens, si ce n’est par l’Esprit ? Bien-aimés, l’Esprit qui vous atteste le pardon de vos péchés, votre adoption, vous dit-il aussi que vous êtes la propriété absolue et incontestée de Jésus-Christ votre Seigneur ?

Quand Marie dit : «Ils ont enlevé mon Seigneur» ; quand Thomas, à la vue des blessures du ressuscité, s’écrie : «Mon Seigneur !» quand, à l’aube, sur la plage, les disciples reconnaissent que «c’est le Seigneur» ; ce mot de Seigneur semble avoir eu dans leurs vies une signification tout autre que celle que nos vies à nous lui donnent trop souvent. Il était leur «Maître» par le fait d’un choix joyeux et reconnaissant. Ils le proclamaient leur Seigneur de tout leur cœur, toujours, et non seulement dans l’exécution d’un chant ou dans un moment d’émotion passagère. La passion de leur vie était d’être tout pour lui, comme il avait été tout pour eux. Leur consécration était véritablement complète. La scène de Actes 2:44, 45, qui soulève tant de questions dans les cœurs non consacrés à Jésus, fait resplendir la souveraineté du Maître, si effective au sein de l’Église, que dans toute cette foule des premiers disciples «nul ne disait que ce qu’il possédait fût à lui !» Bien-aimés, Jésus-Christ est-il pour vous non seulement le Sauveur et le Christ, mais aussi votre Seigneur ?

Le don volontaire de nous-mêmes à Dieu.

Ce n’est pas à une vocation, à un champ de travail, à une occupation ou à un principe que nous nous sommes donnés. Pour beaucoup de chrétiens, la pensée d’une vie livrée est inséparable d’un travail dans la mission, dans l’évangélisation, ou dans quelque ministère spécial.

Aussitôt que l’appel de Christ se fait sentir à quelqu’un, il se demande : «Puis-je prêcher l’Évangile ? Aller en Chine, aux Indes, en Afrique ?»

Dieu ne nous demande pas de livrer notre vie à un champ de travail spécial, mais de la lui remettre à lui, pour ainsi dire en blanc-seing. La décision à prendre n’est pas de partir pour un pays lointain, mais d’avoir en Dieu une confiance telle que nous lui remettions notre vie pour qu’il en fasse ce que bon lui semblera.

Paul dit des Macédoniens : «Ils se sont donnés premièrement eux-mêmes au Seigneur et ensuite à nous selon la volonté de Dieu» (2 Cor 8:5). C’est-à-dire qu’ayant reconnu en eux-mêmes qu’ils devaient avoir confiance en celui qui est mort pour eux et que sa volonté est toujours ce qu’il y a de meilleur, ils se livrèrent à lui sans réserve. S’étant ainsi livrés au Seigneur et ayant été remplis du Saint-Esprit, ils purent se consacrer par une obéissance joyeuse et volontaire au ministère particulier que Dieu, dans sa sagesse, leur avait préparé.

«Premièrement à Dieu ; puis à nous selon la volonté de Dieu». La victoire véritable consiste à nous confier en Dieu sans savoir où ni comment il se servira de nous ; à nous livrer nous-mêmes à Dieu, plutôt qu’à nous introduire dans une mission lointaine avec une volonté encore insoumise. Quand notre volonté se soumet à Dieu, la victoire est alors remportée ; le Saint-Esprit remplit la vie livrée d’un esprit de joyeuse obéissance, et c’est désormais pour nous un besoin et un privilège d’accomplir la volonté de Dieu dans tous les détails de notre vie. Le vrai missionnaire ainsi consacré à Dieu, part pour son champ de travail sans hésitation ni crainte, rempli d’un bonheur indicible, porté par un esprit d’entier dévouement à celui qu’il sert. C’est pourquoi si des questions angoissantes se présentent à nous, pendant que nous luttons pour parvenir à une consécration complète et absolue, disons simplement :

«Seigneur, je me livre à toi pour faire ta volonté quelle qu’elle soit, et quoi que tu demandes de moi, je compte sur toi pour l’accomplir avec joie quand le moment sera venu».

La grâce de se livrer à un travail spécial sera donnée pleinement à celui qui s’est donné pour faire toute la volonté de Dieu. Nous arrivons ainsi à la dernière pensée destinée à définir la consécration

Le don volontaire de nous-mêmes à Dieu pour faire sa volonté au lieu de la nôtre.

Voilà le but final de la vie consacrée. Il y a désaccord entre la volonté de la chair et celle de Dieu. L’homme déchu est en révolte contre la volonté parfaite de Dieu. La rédemption de Jésus-Christ a pour but de rétablir l’accord entre la volonté de l’homme et la volonté de Dieu.

Le jour vient où cette volonté divine sera faite sur la terre rachetée aussi parfaitement qu’elle l’est maintenant au ciel. Puis donc que la volonté de Dieu fera la joie de ses rachetés pendant l’éternité, la seule attitude qui leur convienne, c’est de faire dès maintenant cette volonté, et non plus celle de la chair. La consécration n’est pas autre chose que l’acte par lequel nous prenons cette attitude d’obéissance. Et ce n’est, point un acte qui nous procure aucun mérite devant Dieu ; c’est tout simplement l’acte indispensable par lequel le Dieu de toute grâce, désireux de faire abonder sa volonté parfaite dans la vie de chacun de ses enfants, arrive à la réalisation de son but glorieux sans porter atteinte à la liberté de l’homme, que Dieu respecte toujours.

Pourquoi ?

Pourquoi reconnaître le droit de Christ ? Pourquoi écouter son appel ? Pourquoi répondre à sa demande de lui livrer nos vies ? Parce que la consécration est la réponse à son amour et parce qu’il a besoin de nous.

C’est la réponse à son amour.

Dans la petite chapelle d’un village d’Europe, se trouve une peinture du Christ. Son auteur fut un enfant de Dieu racheté d’une vie de folie et de péché par le sang de Christ. Pendant qu’il travaillait à cette peinture, l’âme de l’artiste fut à tel point inondée d’amour pour son Sauveur, que tous les traits de la figure de l’Homme-Dieu, l’expression de son visage et l’ensemble du tableau, exprimèrent comme nulle autre peinture ne le fit jamais : l’amour, l’amour, l’amour divin. Au bas du tableau, se lisaient ces mots :

Voilà ce que j’ai fait pour toi, Et toi, que fais-tu pour moi ?

Un jour d’été, un jeune noble s’aventura dans la petite église. Son attention fut attirée par la peinture dans laquelle l’Esprit de Dieu avait, par les mains de l’artiste, mis le sceau de son amour. A mesure qu’il se pénétra de l’expression de cet amour, qu’il vit les mains percées, le front sanglant, le côté ouvert de Jésus, qu’il épela lentement les deux vers :

Voilà ce que j’ai fait pour toi, Et toi, que fais-tu pour moi ?

il eut une nouvelle intuition des droits de Jésus-Christ sur toute vie qui participe à sa grâce. Heure après heure, ses regards s’arrêtèrent sur l’Homme de douleur. Au déclin du jour, les rayons attardés du soleil couchant caressaient encore le corps incliné de Zinzendorf, dont les pleurs et les sanglots semblaient impuissants à exprimer ce qu’il éprouvait pour celui qui avait sauvé son âme et gagné son cœur. Quittant la petite chapelle, il entreprit cette œuvre merveilleuse des missions moraves, qui semble incarner mieux qu’aucune autre mission l’amour de Christ pour un monde perdu.

Croyant, est-ce que tu as eu cette vision du Christ souffrant, de celui qui a donné sa vie pour gagner ton cœur ? Et dès lors, la passion pour lui a-t-elle consumé ta vie ? Il t’a aimé jusqu’à la mort. Cette grande nouvelle a-t-elle produit en toi plus que la joie du salut, une consécration pleine et entière ? Après avoir accepté son pardon, as-tu joyeusement reconnu son droit de propriété sur toi ? Est-il dans ta vie aussi bien le roi couronné que l’agneau immolé ?

Tu as participé à de grandes réunions de réveil, où toutes les influences se sont unies pour persuader les hommes d’accepter le salut. Le prédicateur a fait entendre son message avec puissance à la multitude assemblée. Les prières se sont transformées en cris d’angoisse pour le salut des pécheurs. Les chants sont saisissants. Et alors, toi qui te courbais sous toutes ces puissantes influences, tu t’es étonné de voir des hommes et des femmes qui restaient là indécis et insensibles. Mais toi, enfant de Dieu, es-tu plus excusable qu’eux ? Toi, qui juges les autres, «tu te condamnes toi-même«. Ces hommes et ces femmes qui paraissent insensibles, ont-ils comme toi fait l’expérience de la miséricorde divine ? Ont-ils comme toi été arrachés à une condamnation affreuse par le Sauveur en croix ? Les joies et les bénédictions du ciel se sontelles ouvertes devant eux comme devant toi ? Leurs âmes, rougies par le péché, ont-elles comme la tienne été blanchies comme la neige ? Est-ce qu’ils ont senti comme toi le tendre attouchement de sa main ? est-ce qu’ils ont entendu la douce assurance de son pardon ? ont-ils comme toi goûté sa paix ineffable par la vision de son agonie et de sa mort expiatoire ?

Bienaimé, si le refus du pécheur de renoncer au mal, quand il y est sollicité par l’Esprit, constitue une responsabilité solennelle, le refus du croyant de livrer sa vie après avoir fait l’expérience de toutes les miséricordes de Dieu, ne serait-il pas encore plus triste et plus funeste ? Si le pécheur est coupable en résistant obstinément au Christ qui veut le sauver, ne le sommes-nous pas bien davantage, nous qui, sauvés par lui, refusons de nous laisser employer pour le salut d’autrui ? Avec quelle insistance ne nous presse-t-il pas de nous livrer à lui ! Avec quelle tendresse il nous sollicite :

«Je vous exhorte, frères, par les compassions de Dieu, que vous offriez vos corps en sacrifice !»

Ce n’est pas l’homme, ce n’est pas Paul, c’est Jésus lui-même qui supplie ses frères par la voix d’un homme de lui livrer leurs vies dont il a besoin pour son œuvre. Représentez-vous qu’il entre ce soir à la réunion. Tandis que nous sommes assis dans le désir et dans L’attente d’une bénédiction, la porte s’ouvre, c’est lui qui entre. Et le voilà qui s’avance, lui dont la présence était autrefois si familière au peuple sur les rivages galiléens, dans les rues de Jérusalem et dans les fêtes nationales. Il se lève tranquillement et se tourne vers nous. Jésus ! C’est ce doux sourire qui réjouissait ses auditeurs il y a deux mille ans ; c’est sa voix familière qui fait vibrer les cordes les plus profondes de notre âme par des paroles de vie et de paix ; c’est ce même regard, celui de l’homme de douleur, plein de compassion et de tendresse infinie. Comme les cœurs battent, remplis de sa présence ! Et alors c’est une prière d’humiliation qui en sort ; nous sommes pressés d’implorer son pardon pour notre tiédeur dont nous rougissons ; nous le supplions d’oublier notre indifférence et notre égoïsme qui nous remplissent de confusion et de remords. Nous nous demandons s’il pourra pardonner notre négligence à proclamer sa grâce aux païens, négligence qui prend maintenant à nos yeux l’aspect d’un crime épouvantable. Mais tandis que nous sommes accablés sous le poids de notre méchanceté, de notre mondanité et de notre incrédulité, et que nos lèvres essaient péniblement de se mouvoir, tandis que nos genoux fléchissent… ô miracle ! Nos yeux nous trompent-ils ? Lui, le Roi, le Seigneur, le Créateur, c’est lui qui nous supplie, nous ses sujets, ses serviteurs, ses créatures ! Étendant ses mains percées, touchant son front meurtri, montrant la plaie à son côté, c’est lui qui nous dit :

«Enfants de Dieu, je vous supplie ! Au nom des hommes qui meurent, au nom du temps qui s’écoule, au nom de la folie de ce monde, au nom des besoins intimes de votre cœur, par mon sang versé pour vous, par la mort que j’ai subie pour vous, par ma résurrection qui est votre vie, par la gloire qui vous est préparée, je vous supplie d’offrir vos corps en sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu».

Malheur à ceux qui ne veulent pas l’accepter comme Sauveur. Mais deux fois malheur à ceux qui, lavés dans le sang de la rédemption, couverts de la colère de Dieu par son corps meurtri, vivifiés par la vertu de sa résurrection, refusent de se livrer à leur Seigneur. Comment, à la vision de son amour, nos yeux peuvent-ils être assez aveuglés, nos oreilles assez sourdes, nos cœurs assez fermés, pour ne pas répondre par le sacrifice vivant de tout notre être. Quel ne sera pas notre étonnement à la vue de nos vies perdues, parce que gardées égoïstement, quand au grand jour des rétributions, nous nous tiendrons devant celui qui vida pour nous jusqu’au fond la coupe de la souffrance. La gloire même qui nous enveloppera ne sera-t-elle pas, en même temps qu’une attestation de sa grâce, un reproche terrible de ne pas avoir répondu à cette grâce par une pleine consécration ?

Ressuscités avec lui, participant à sa magnificence et à sa royauté, nous serons aussi appelés à juger le monde, et avec quelle confusion ne devrons-nous pas nous juger nous-mêmes ? Jetant un regard en arrière sur notre vie non consacrée, nous la verrons alors comme il la voit lui-même et nous devrons nous associer au jugement solennel prononcé sur toutes nos lâchetés. Pensée effrayante ! «Mais si nous nous jugions maintenant nous-mêmes, nous ne serions pas jugés». Tranchons donc aujourd’hui cette question, et cela à la lumière de l’éternité, à laquelle nous devrons la juger alors. «Avant que vienne la nuit, mettons notre vie aux pieds de Celui qui nous a aimés et nous a lavés de nos péchés dans son sang et nous a faits rois et sacrificateurs à Dieu son Père».

Il a besoin de nous.

  • Le Seigneur a besoin de toi qu’il a sauvé. Le commerce, avec son cortège de bruit, de fièvre et de fatigue, met la main sur le chrétien et lui dit avec autorité : «J’ai besoin de toi. Il faut que tu peines, que tu combines, travailles, amasses, que tu meures à mon service».
  • La société aussi affirme ses droits : «J’ai besoin de ton esprit, de tes talents, de ta beauté et de tout ce qui brille dans le monde élégant, en échange, si tu te livres à moi, je te donnerai des jouissances illimitées».
  • Notre profession vient ensuite : «Donne-toi entièrement à la vocation que tu as choisie, et, si tu m’écoutes, je satisferai tes plus hautes ambitions».
  • Mais voici une autre voix qui nous arrive à travers vingt siècles de distance. Cette voix, aussi vraie aujourd’hui que jamais, s’adresse tendrement aux enfants de Dieu à ‘heure où ils constatent que ni la richesse, ni le plaisir, ni l’ambition n’ont satisfait leurs cœurs : «Le Seigneur a besoin de toi».

Supposez que vous soyez absent de la maison, entraîné par les affaires, par les plaisirs ou par votre activité professionnelle et qu’un message pressant vous apprenne que votre femme est à la mort et vous réclame auprès d’elle. Aucun de tous les intérêts qui vous sollicitaient ne vous empêchera de répondre à la voix impérieuse des circonstances. Votre cœur, l’habile artiste, aurait vite fait de vous représenter l’affectueuse angoisse de votre bien-aimée et le message : «Celle que tu aimes est malade», vous aurait bien vite amené à son chevet. Malgré tous les intérêts divers qui réclament votre vie, vous ne pouvez échapper à ce grand fait que le Seigneur que vous aimez a besoin de vous.

Que nous ayons besoin du Seigneur, cela ne fait pas de doute. C’est ce que nous chantons, et c’est aussi ce dont nous faisons l’expérience : «chaque jour, à chaque heure, oh ! j’ai besoin de toi«. Nous avons besoin de lui pour recevoir la lumière, le secours, la paix, la puissance, la victoire. Mais que, lui, il puisse avoir besoin de nous, quel sujet d’étonnement ! Et pourtant, c’est bien vrai. «Je suis le cep, vous êtes les sarments», c’est son message. En avonsnous compris toute la portée ? Il est clair que les sarments ont besoin du cep qui est la source de leur vie. C’est de lui qu’ils tirent sans interruption le filet imperceptible de sève vivifiante qui nourrit et produit la feuille, la fibre et le fruit. Sans lui, ils ne pourraient rien faire. Séparés du cep, les sarments sèchent et meurent. Mais n’est-il pas vrai aussi que le cep a besoin des sarments ? Car le cep porte ses fruits par le moyen des sarments ; il ne peut rien faire sans eux. Jamais on ne verra une grappe sur le tronc, toujours sur les sarments.

«Je vous ai choisis afin que vous alliez et que vous portiez du fruit et que votre fruit soit permanent».

Christ est le vrai cep, le cep vivant. Il est la source de tout ce qu’il nous faut. Mais il porte son fruit par nous. Il a besoin de nous pour porter du fruit, comme nous avons besoin de lui pour vivre. Il ne peut se passer de nous.

Parfois une grande treille a poussé derrière le mur d’un château. De dehors, aucun œil ne perçoit le tronc robuste, caché dans la riche terre du jardin. Mais il se révèle et réjouit l’œil du passant par des centaines de branches qui couvrent le mur d’une profusion de feuillage, de fleurs et de fruits savoureux. Le cep est la source de la vie des branches, les branches sont l’expression de la vie du cep. C’est ainsi que Christ est le cep divin. Il est caché derrière le voile qui sépare le monde visible de l’invisible et notre vie est «cachée avec lui en Dieu». Les hommes ne le voient pas. La tête du corps est dans le ciel, nous, les membres, nous sommes sur la terre. Il faut donc que le cep caché se fasse connaître par ses branches chargées de fruits.

Jésus-Christ ne vient plus comme autrefois dans les rues, dans les synagogues et dans les campagnes prêcher la bonne nouvelle de l’Évangile, il veut le faire par nous. Il ne soulage plus les malades et les affligés de ses propres mains, il a besoin des nôtres pour le faire. Il n’est plus là pour avertir les impénitents, consoler les affligés, fortifier les découragés par des paroles sortant de ses lèvres, il désire le faire par nous, ses membres et ses branches.

C’est de toi que le Seigneur a besoin. Pour faire son entrée triomphale à Jérusalem, Jésus eût pu choisir un carrosse magnifique et des chevaux de grand prix. Mais il choisit la monture la plus humble. Ce n’est pas faute de mieux qu’il se servit d’un ânon, il l’a choisi afin d’accomplir les Écritures. De même, «Dieu a choisi les choses folles… et Dieu a choisi les choses faibles… et Dieu a choisi les choses viles du monde et les plus méprisées» (1 Cor 1:26). Ce sont ceux qui ne sont rien qui sont choisis de Dieu. Il ne choisit les sages et les nobles que quand ils consentent à n’être rien. Il peut faire plus avec un rien qui lui est consacré qu’avec la magnificence qui se complaît en elle-même. Et c’est ainsi que nous pouvons vous dire aujourd’hui :

«Vous, serviteurs qui n’avez qu’un talent, vous qui pensez que les autres sont propres au service de Dieu, mais pas vous-mêmes, vous qui tremblez à chaque appel, vous, les faibles, c’est de vous que le Seigneur a besoin».

Vous êtes bien véritablement ceux que Dieu a choisis, si vous consentez à vous placer entre ses mains dans cet esprit d’anéantissement dont nous devons être animés pour que nulle chair ne se glorifie devant lui. Approprions-nous cette vérité précieuse et plaçons-nous dans la main de celui qui peut ébranler les montagnes avec le plus faible instrument. Et alors que nous soyons dans la rue, ou en prière dans notre cabinet, à nos affaires ou penchés sur la Parole de Dieu, qu’il sera doux de nous répéter à nous-mêmes : «Le Seigneur a besoin de moi ; oui, le Seigneur des cieux et de la terre a besoin de moi !» Et ce sera avec joie que nous livrerons nos vies à celui qui condescend à nous associer à son travail pour le temps et l’éternité.

Comment ?

Soyez précis.

Aussi bien à l’horizon de nos montagnes qu’au rivage de nos mers, il est une ligne de démarcation bien nette. Que la consécration qui sépare la vieille vie égoïste de la nouvelle vie livrée à Dieu soit aussi bien définie. Peut-être sommes-nous arrivés à ce moment par une longue série d’événements et de manifestations de la bonté divine. Mais quand l’appel se fait entendre clairement, quand la bataille s’engage, une décision s’impose.

Livrons-nous sans réserve, ou bien assumons la solennelle responsabilité d’un refus. Plusieurs hésitent et marchandent avec la vérité, se persuadant que leur indécision n’est pas un refus. Et pourtant, l’un vaut l’autre.

La conscience desséchée et engourdie est atteinte dans ses forces vives. Il arrive un moment où éluder une décision équivaut à un refus de notre part. Tranchons la question comme il convient à une âme immortelle rachetée par Jésus-Christ et mise en présence de toutes les exigences du Maître. Examinons, réfléchissons, mais ensuite prenons notre décision d’une manière irrévocable. Il est précieux d’avoir un souvenir précis de la date et de l’importance de cette transaction avec le Seigneur. Ce sera un moyen puissant pour nous raffermir plus tard dans les temps d’épreuve.

Ayons confiance.

Si nous nous confions à un médecin en cas de maladie, et que nous nous soumettions à son traitement, à plus forte raison devons-nous être patients lorsque Dieu agit en nous. Nous ne parvenons pas d’un bond à la stature parfaite de Jésus-Christ. On ne détrône pas le moi d’un seul coup de main. L’œuvre de notre renoncement ne devient parfaite que si nous portons notre croix jour après jour (Luc 9:23). Nous ne saisissons pas d’emblée toute la portée de notre consécration, et la révélation de tout notre égoïsme ne nous est pas donnée en une seule fois. Notre cœur se briserait de désespoir s’il nous arrivait de nous voir tout à coup tels que nous sommes. Ce n’est pas en un instant, en un mois, en un an, que nous percevons la pleine lumière de la Parole de Dieu, la pleine connaissance de sa volonté. Il a bien promis de nous «guider dans toute la vérité», mais non pas en une fois. C’est pourquoi soyons confiants, patients. Il nous connaît comme nous ne nous connaîtrons jamais nous-mêmes. Il y a en nous mille choses dont la présence empêche que notre purification soit une affaire de peu de temps. Ayons confiance, toutes choses arriveront à chef en leur temps.

Ne faisons pas de réserves.

Que notre acte de consécration à Dieu pénètre tous nos intérêts, tous nos plans, toutes nos capacités, tout notre être. Qu’une pointe du compas soit plantée bien au centre, dans le cœur et la volonté et que l’autre trace la ligne comprenant l’horizon le plus lointain. Comme il n’y a dans nos vies aucun détail trop infime pour l’attention du Dieu d’amour, il n’y a rien non plus qui ne mérite de lui être consacré. Sans doute, Dieu ne nous demande pas de tout savoir, il nous demande d’être sincères. Il n’exige pas que nous voyions à la fois toutes les conséquences impliquées dans l’acte de notre consécration. Le Dieu miséricordieux dont le culte comprenait des sacrifices pour les péchés ignorés, use de douceur à l’égard de l’ignorance de ses enfants.

Ce qu’il nous demande, c’est de lui livrer consciencieusement tout ce dont nous avons connaissance, et de lui abandonner aussi avec confiance tout ce qui pourrait nous être montré dans l’avenir comme étant impliqué dans notre acte de consécration.

Soyons attentifs à lui appartenir complètement, et «si en quelque chose nous sommes d’un autre sentiment, Dieu nous le révélera aussi». Si donc notre cœur est droit dans ses intentions et dans ses actes, ne craignons pas que Dieu refuse notre consécration parce que nous n’en aurions pas entrevu toute la portée. Notre Dieu n’est ni déraisonnable, ni arbitraire, mais tendre, rempli de bonté et de compassion. La consécration de notre vie, faite d’un cœur sincère, avec les lumières dont nous disposons, est une offrande que Dieu juge acceptable.

Mais prenons garde de rien retenir le sachant et le voulant. Que notre acte de renonciation ne contienne aucune exception suggérée par le moi, aucune résistance consciente à la volonté de Dieu. Quand nous nous disons en nous-mêmes : «Je puis dire oui à Dieu, je puis lui soumettre ma volonté, je puis me confier en lui pour toutes choses, sauf celle-ci», nous pouvons être sûrs que c’est précisément cette chose-là qui nous occasionnera un désastre spirituel. Il peut paraître insignifiant qu’un enfant refuse à sa mère de ramasser un objet qu’il a violemment jeté à terre, mais l’esprit de désobéissance que ce refus révèle est une chose grave, qui rompt la communion entre la mère et l’enfant, et fait une brèche irréparable dans le caractère de celui-ci. De même telle réserve que nous pourrions faire quand nous livrons notre vie à Dieu peut paraître insignifiante, mais c’est la défiance et l’insoumission dont elle est l’expression qui sont fatales à nos relations avec Dieu, et nous priveront de la manifestation de son Esprit en nous. Il faut peu de chose pour arrêter un rayon de soleil, mais ce peu de chose est loin d’être une bagatelle. De même une petite réserve faite dans nos cœurs suffit pour nous ôter la plénitude de Dieu, si essentielle à l’âme.

Par une nuit d’orage et de tempête, les habitants d’une petite ville de la côte de la Nouvelle Angleterre virent une chose étrange en regardant le phare dans l’obscurité. La cloche d’alarme fit entendre des accents de détresse, et l’on aperçut soudain la lumière du phare changer rapidement, de place, rester un instant comme suspendue au-dessus des flots, puis décrire un arc et disparaître dans la mer en tourmente, avec le phare et ses habitants solitaires. Le matin révéla le secret de cette catastrophe. Les gardiens avaient quelque temps auparavant fixé un gros câble entre le sommet du phare et les rochers de la côte pour hisser plus facilement leurs provisions. Quand l’orage s’éleva cette nuit-là, des vagues énormes frappèrent la haussière de coups si redoutables que la charpente métallique fut ébranlée par l’effort ; le phare chancela et fut entraîné à sa ruine. Une seule ligne d’attache avait accompli l’œuvre de mort. Une seule exception dans notre consécration à Dieu peut produire les mêmes ravages. Si nous sommes sauvés, elle n’entraînera pas notre âme à la ruine. Mais elle peut arrêter Dieu dans la réalisation de ses desseins de plénitude, en sorte que notre bateau, sans faire naufrage, entre dans le port de l’éternité comme une pauvre barque vide, alors qu’il eût pu s’avancer comme un vaisseau richement chargé.

Ne revenons pas en arrière.

Un acte de transfert est irrévocable. Que notre consécration le soit aussi ; qu’il ne soit jamais nécessaire de la renouveler, parce qu’elle n’aura jamais été mise en question. Une jeune fille étourdie se plaît à chicaner l’enfant confié à sa garde en lui montrant un objet qu’elle retire au moment où il veut le saisir. Cela se répète tant de fois que l’enfant ne sait plus s’il aura l’objet ou pas. Il y a des efforts de consécration qui sont aussi peu sincères. Nous paraissons offrir notre vie à Dieu, mais dès qu’il veut en prendre possession, nous la retirons brusquement, pour renouveler encore et l’offre et le retrait. Que toute vie soit offerte à Dieu sans aucune pensée de retour en arrière ; autrement notre sincérité sera mise en doute. Quand notre vie a été réellement livrée à Dieu, on ne parle jamais de reconsécration, et un enfant de Dieu vraiment consacré ne doit pas avoir à se consacrer à nouveau toutes les semaines ou tous les mois. Toutes les fois qu’il le fait, il jette un doute sur la réalité de la transaction par laquelle il s’est livré à Dieu une fois pour toutes. Ce que nous avons à faire non pas toutes les semaines et tous les mois, mais journellement et à toute heure, c’est de nous dire :

«Seigneur, je t’appartiens pour toujours, ne permets pas que j’en doute ou que je l’oublie».

Voici un joli trait de Bengel, le fameux commentateur. Il avait travaillé tout le jour sur le Livre des livres. Le soir venu, un de ses étudiants l’observa pour voir quelle serait sa fidélité à faire ses dévotions malgré sa fatigue. Vers minuit, il vit le saint homme fermer son livre et se rendre au repos avec ces simples paroles : «Seigneur, tu sais que nos vieilles relations sont toujours les mêmes». C’est ainsi que, serviteurs de Dieu, nous devrions jour par jour pouvoir lever la face vers celle de notre Maître en lui disant : «Seigneur, tu le sais, nos relations sont toujours les mêmes ; je suis à toi, tu es à moi pour toujours».

Soyons inébranlables.

Veillons à ce que nos meilleurs amis n’ébranlent pas notre fermeté. Souvent nous restons forts et décidés en face des assauts manifestes de l’ennemi, mais notre cœur chancelle et notre âme s’épouvante quand notre chemin est traversé par l’ombre angoissante de divisions et de dissentiments avec ceux-là même dont l’approbation et l’affection nous sont surtout précieuses. C’est ici que la tentation est dangereuse et que plusieurs font des chutes désastreuses. L’épouse qui était prête à tout sacrifier pour le Seigneur, s’effraie à la pensée de la barrière qu’une vie entièrement consacrée pourrait élever entre elle et son mari. Le mari, qui semblait prêt à tout mettre aux pieds de Christ, n’ose plus dire tout quand il réfléchit que sa bien-aimée va peut-être se détourner de lui. L’épreuve paraît trop dure. C’en est trop pour la chair et le sang de trouver des ennemis dans sa propre famille, et les liens du sang portent ainsi atteinte à une fidélité envers Christ qui devrait n’avoir aucune limite. Tout cela vient du malin, ainsi que nous le voyons par la réponse de Jésus à son disciple bien-aimé qui cherche à le détourner du chemin de la croix : «Arrière de moi, Satan».

La ruse du tentateur consiste simplement à employer les liens les plus tendres de la nature pour nous entraîner loin de Dieu.

Et notez que nos compromis manquent toujours leur but. La femme chrétienne qui consent au jeu ou à la danse dans l’espoir de gagner de l’influence sur son mari, prend le chemin le plus sûr pour la perdre. Le seul espoir qu’elle ait d’élever son mari à une vie consacrée, c’est de lui montrer combien une vie semblable a de valeur à ses yeux. Ce qui, en effet, pourra le mieux convaincre un homme du prix de cette vie, c’est de voir que sa femme n’en veut pas faire le sacrifice, pas même sur l’autel de l’affection conjugale. Cette vie, au contraire, est rabaissée et déshonorée à ses yeux quand il voit que sa compagne n’y tient pas pardessus tout. «Ce qu’elle lâche si facilement, se dira-t-il, est sûrement de si peu de valeur, que ce n’est pas la peine de le rechercher». Après tout, le joyau de sa couronne spirituelle est falsifié. Le respect se perd et l’influence s’en va. C’est ainsi que le compromis tourne à fin contraire. Il est des cœurs qui ont fait cette expérience à leur indicible chagrin. Par contre, très nombreux sont les cas où une loyauté à toute épreuve envers Dieu a servi à lui amener un bien-aimé.

Quelle ne sera pas notre douleur d’apprendre un jour que notre manque de fidélité a été exploité par l’Ennemi et a causé le naufrage, ou tout au moins la médiocrité d’une vie qui nous était chère. Nous connaissons une femme qui, aujourd’hui, rejette Jésus-Christ avec obstination, parce qu’elle préférait être perdue avec son mari que sauvée sans lui. Que ce sera terrible pour elle de reconnaître dans l’éternité que si elle avait été obéissante, son mari eût suivi, lui aussi, le Seigneur ! Ils sont nombreux, les hommes et les femmes qui auraient défendu l’étendard d’une vie livrée contre tout autre ennemi, mais qui l’ont laissé choir dans la poussière parce qu’ils n’ont pas osé lutter dans leur propre maison. Celui qui ne prend pas soin des siens, est pire qu’un infidèle, «mais celui qui aime son père ou sa mère plus que moi, n’est pas digne de moi». Soyons fidèles à Dieu, quoi qu’il en coûte. Dieu se charge des conséquences de notre obéissance.

Vous qui, dans le cercle de famille, restez fidèles, gentiment et tendrement, mais avec une ténacité inébranlable, sachez que vous faites la seule chose qui puisse élever vos bienaimés à une vie spirituelle véritable. Ne craignez rien, soyez patients, remplis d’amour, et la victoire qui sort de la prière et de l’obéissance, après s’être fait un peu attendre, sera d’autant plus complète et plus glorieuse quand elle se manifestera.

Ayons une grande espérance.

Un jeune homme à la fleur de l’âge se mourait de consomption. Il avait passé loin de Christ ses années de force et de santé, mais peu avant sa dernière maladie, il avait donné son cœur à Dieu, dont la longue patience l’avait vaincu. Ses derniers jours furent remplis d’une confiance enfantine, d’une paix complète, rares chez quelqu’un de si jeune. Un jour qu’il avait pu quitter sa chambre, un ami lui dit que Dieu lui ferait peut-être retrouver force et santé. «Ah ! frère, répondit-il le visage rayonnant de joie à cette pensée, qu’il ferait bon vivre maintenant !» Après les années passées loin du Seigneur et après l’expérience de la rédemption de son âme, la pensée de vivre pour Christ plutôt que pour lui-même, remplissait le cœur du jeune homme mourant d’un intense désir qui ne pouvait plus se réaliser ici-bas.

Bien-aimés, après des années de déceptions, de projets qui ont échoué, de recherche de nous-mêmes, après avoir suivi le Seigneur de loin et nous être révoltés contre la main qui frappait, nous finissons par arriver au renoncement et nous nous livrons au Seigneur, au Maître de notre vie, qui pendant tout ce temps plaidait avec insistance pour la possession de notre cœur.

C’est alors avec un joyeux assentiment que nous répétons les mots du jeune garçon mourant : «Qu’il fait bon vivre maintenant !» Ô toi qui es troublé, épouvanté, désorienté, sois sûr que si ta vie a été toute de discorde et de dissonance, c’est uniquement par ce que tu étais hors du centre, c’est-à-dire de Christ. Mais maintenant que ta volonté rebelle s’est livrée et que tu trouves celle du Seigneur «bonne, agréable, parfaite», maintenant que tu connais la paix en Dieu aussi bien que la paix avec Dieu, maintenant que tu as trouvé le plan de ta vie qu’il avait préparé de toute éternité et que, joyeusement, tu obéis à l’ordre qu’il donnait à Daniel : «Toi, va à ton lot» ; maintenant que «vivre c’est Christ et que mourir est un gain, qu’il fait bon vivre maintenant !» C’est pourquoi sois plein d’espérance. Bien que tes progrès vers la ressemblance parfaite de Christ soient lents et que tu t’effraies en constatant de plus en plus la puissance de la chair ; bien que la consécration de ta vie dépasse ce que tu avais pensé ; bien que le sommet de la vie chrétienne semble s’élever toujours plus haut et te paraisse inaccessible, malgré tout espère. Dieu est à l’œuvre, il guide, il taille, il transforme. Il arrive à son but mieux que jamais. Regarde en arrière, aux jours qui se sont écoulés depuis que tu t’es livré à lui et réjouis-toi du progrès réel de sa vie en toi. Tu n’es pas encore où tu voudrais ? Non, certes, et tu n’es pas non plus là où il désire te voir. Mais il est fidèle. Toi, espère, et il te fera parvenir à la place, à la puissance et au repos préparé de toute éternité en Christ pour toi.

Alors.

Quand nous avons cédé à la tendre sollicitation du Seigneur de lui livrer nos corps, quand nous avons reconnu son droit absolu sur nous, quand la conviction de péché et la lutte ont été suivies d’une décision, qu’arrive-t-il alors ?

La plénitude de l’Esprit.

  • Y aura-t-il manifestation de la plénitude de l’Esprit quand nous lui aurons livré nos vies ?
  • Serons-nous conscients d’un grand changement intérieur ?
  • Y aura-t-il une transformation consciente, un nouveau degré conscient de l’expérience chrétienne ?

Voici notre réponse :

    • Est-ce que le fleuve indolent se rend compte de ce qui arrive quand les eaux de la mer se précipitent dans son embouchure et que l’élan et le choc des vagues le purifient ?
    • Est-ce que le vieux château sombre et isolé sent l’air frais envahir ses salles, quand on les ouvre tout à coup aux courants du dehors ?
    • Est-ce que les yeux voilés par les ténèbres pendant des années, sont conscients de la brillanté lumière du jour quand, pour la première fois, ils s’ouvrent à elle ?

 

De même, il y a une manifestation consciente pour l’âme qui s’est donnée à Dieu complètement et pour toujours. Il y aura un changement, une expérience de la présence du Saint-Esprit à un degré auparavant inconnu, le sentiment que la grande crise de la vie spirituelle s’est opérée.

Peu importe que cette manifestation fasse irruption en nous avec l’éclat du soleil qui jaillit soudain à travers les nuages sombres, ou qu’elle s’établisse doucement comme la clarté du crépuscule du matin. C’est assez de savoir qu’une telle manifestation se produit, que l’Esprit se révèle par une plénitude, une puissance et une bénédiction jusqu’alors ignorées. Ses supplications pour que nous lui consacrions notre être ont atteint leur but, et notre consécration n’a pas été une démarche vaine. Sa promesse s’est accomplie.

«Je me manifesterai à vous comme je ne me manifeste pas au monde».

Dès lors, il y a une hauteur et une profondeur, une paix, une puissance, une joie et une bénédiction, une communion et une utilité, des prières et des actions de grâces, que le passé n’avait jamais réalisées. L’âme qui se donne à Dieu pleinement est transformée au delà de ses espérances les plus avides ; les bienfaits de la vie abondante s’accroissent en richesse et en plénitude de jour en jour ; Dieu fait «infiniment plus que tout ce que nous pouvons demander et penser». Nous sommes «fortifiés puissamment par son Esprit dans l’homme intérieur» ; remplis de toute la plénitude de Dieu, et de cette plénitude découlent service, témoignage et bénédiction pour tout notre entourage[2].

N’allons pas en conclure que la consécration soit un acte méritoire par lequel on gagne la plénitude de l’Esprit, c’est seulement un acte dont l’accomplissement permet à l’Esprit de se communiquer pleinement. Dieu ne submerge pas notre être sous les vagues puissantes de la vie spirituelle sans que notre liberté ait dit un mot. Il ne saisit pas des hommes et des femmes pour les transporter aux sommets d’une vie chrétienne et bénie sans égard pour leur choix ou leur résistance. La méthode du Saint-Esprit semble être, au contraire, de convaincre d’abord de la plénitude de Dieu et de la pauvreté de l’âme, puis de solliciter un pas dans l’obéissance, qui donnera au Dieu tout prêt à bénir l’occasion d’accorder l’abondance de la vie et de la bénédiction. La révélation et la conviction de la vérité ; l’obéissance de la foi à cette vérité reconnue ; la bénédiction, conséquence de cette obéissance ; voilà l’ordre sans doute invariable du travail du Saint-Esprit dans l’âme. C’est dans cet ordre divin que la consécration est à sa vraie place, et que Paul s’écrie :

«Donnez-vous vous-mêmes à Dieu».

La consécration ne gagne ni n’achète la grâce de Dieu, elle lui donne seulement l’occasion d’agir. Elle ne construit pas le réservoir de la vie abondante, mais elle ouvre le canal par lequel cette vie «est répandue dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné».

Christ déclare «que des fleuves d’eau vive découleront de notre sein». Il disait cela de l’Esprit qui est en ceux qui croient en lui. Or, la consécration n’est pas autre chose qu’une forme élevée de la foi. C’est, en effet, une forme élevée de la foi que de confier toute notre vie à la garde de Dieu en faisant sa volonté et en nous soumettant à lui. Voilà pourquoi nous pouvons nous attendre à trouver la plénitude de la vie de l’Esprit après cette consécration absolue qui a fait le sujet de cette étude. Car Dieu ne manque jamais de répondre aux actes de foi de ses enfants, et la foi qui a reçu l’Esprit à la conversion ne peut manquer de connaître la plénitude bénie de ce même Esprit, quand elle se livre d’une manière complète à celui qu’elle a déjà reçu.

La lumière de la vie.

La Parole dit de Christ :

«En lui était la vie et la vie était la lumière des hommes» (Jean 1:4). Christ aussi, dit de lui-même : «Celui qui me suit… aura la lumière de la vie» (Jean 8:12).

Cette phrase si frappante, «la lumière de la vie», nous montre comme seconde conséquence de notre consécration la lumière qui envahit l’âme par la vie abondante de l’Esprit. Les pâles rayons de la lune dans la nuit tombent froids et sans vie sur la terre. Mais la lumière du soleil réchauffe et vivifie cette même terre et fait grandir toutes les plantes qu’atteignent ses rayons bienfaisants. Ce n’est pas seulement de la lumière, mais c’est la lumière de la vie, une lumière spéciale, une lumière issue d’un corps vivifiant, qui agit, travaille et engendre la vie par son rayonnement. C’est cette lumière spéciale qui est répandue dans le cœur d’un enfant de Dieu consacré. Elle diffère de la connaissance. C’est bien plus que la lumière pâle et superficielle que nous recevons par le moyen de l’intelligence. C’est la lumière de la vie ; c’est la lumière qui rayonna de l’Esprit de vie qui est en Christ. Nulle autre lumière n’illumine et ne nous révèle la vérité comme elle. L’homme consacré voit les choses tout autrement qu’auparavant.

La Parole de Dieu devient pour lui un livre nouveau. Elle le travaille, elle le pénètre ; elle le convainc de péché et lui montre sa dissemblance avec Christ ; elle cherche et met à nu les dernières profondeurs de l’âme ; elle dévoile la sainteté de Dieu ; elle stimule la croissance ; elle fait naître de nouvelles aspirations ; elle pousse au zèle dans le service de Dieu d’une manière inconnue auparavant. Ne nous étonnons pas de cela ; car ce livre n’est autre que le livre de l’Esprit de vie, dont les pages sont remplies de la lumière de la vie pour celui qui cherche l’abondance de la vie de Christ. L’âme aussi est remplie de cette nouvelle lumière, non seulement par la Parole de Dieu, mais par le moyen des dispensations providentielles de Dieu et des avertissements intérieurs de son Esprit. Ainsi illuminée, elle commence à comprendre le secret des directions divines. Le passé se voit sous un jour nouveau. Des événements qui semblaient n’avoir aucun rapport entre eux se présentent à nous comme des anneaux dans la chaîne de la Providence. Des impressions que nous avions reçues sans les comprendre se dévoilent comme des mouvements et des indications de l’Esprit de Dieu en nous. Nous reconnaissons maintenant la volonté divine dans les épreuves et les châtiments de la vie aussi bien que dans ses joies et ses bénédictions, et l’expérience ineffable de la croissance de l’œuvre de Dieu dans notre vie est une preuve certaine que la lumière de la vie illumine notre être intérieur de la clarté de ses rayons.

Purification.

C’est là encore une phase importante succédant à la consécration. Quand nous nous livrons à Dieu en sacrifice vivant, bien que notre offrande soit sainte et agréable par le fait de notre union avec Christ, nous sommes loin de posséder une sainteté qui nous soit propre. Et cependant, ce n’est qu’en proportion de la sainteté de notre vie et de nos progrès en lui que Dieu peut réaliser sa volonté par nous, ses instruments. Ce que nous sommes devient la mesure de ce que nous pouvons faire, ou plutôt de ce que Dieu peut faire par nous. Il nous faut ressembler à Christ dans notre vie intérieure, si nous voulons lui ressembler dans le travail extérieur.

Un Dieu saint a besoin d’un instrument saint dans lequel il puisse reproduire sa vie sainte.
Tout ce qui reste en nous de nous-mêmes empêche la manifestation de Christ en nous. Nous pouvons donc nous attendre à ce que Dieu, qui a besoin d’un instrument saint à son service, travaille à notre purification dès que nous nous livrerons à lui.

«Le Seigneur châtie celui qu’il aime» ; (littéralement «fait son éducation»). Quand nous nous sommes consacrés à lui, il met ses mains sur nous, non pas dans l’esprit de la loi, mais dans sa grâce, non pour punir, mais pour purifier, non à la façon du juge, mais dans l’amour d’un père. Le plaisir qu’il trouve en son Fils premierné est si grand qu’il voudrait nous transformer tous à son image. Celui qui nous châtie, c’est un père soucieux de voir son enfant atteindre le degré le plus élevé de la ressemblance avec Christ. Notre souffrance est un affinage pareil à celui que subit le métal. Et nous pouvons aider ou empêcher cette œuvre de Dieu en nous. Que nos volontés soient dociles et soumises, l’œuvre bénie se poursuivra promptement, tandis que si elles sont rebelles, notre purification ne se fera que lentement et incomplètement.

«Sanctifie-les par ta vérité, ta Parole est la vérité»,

priait Jésus. Et c’est exactement ainsi que le Père fait notre éducation. L’Esprit de vérité révèle la stérilité, la pauvreté et la difformité de notre vie propre, la richesse, la plénitude et la beauté de la vie de Christ en nous. C’est au moyen de la révélation de ces vérités que l’Esprit cherche à gagner l’assentiment de notre volonté pour mettre fin à l’une et faire naître l’autre de ces vies ; et c’est dans la mesure où nous nous y prêterons volontairement qu’il lui sera possible de produire dans notre cœur et dans notre marche spirituelle cette sanctification qui déjà est complète dans notre union en Jésus-Christ.

Séparation.

«La même lumière qui nous montre le péché, nous fera voir aussi le chemin pour en sortir, dit Andrew Murray. L’Esprit qui nous révèle le péché est aussi celui qui nous conduira à nous séparer de lui et des choses qui l’entretiennent. Et l’enfant de Dieu consacré sera bientôt conduit dans le chemin de cette séparation. Des choses qui paraissaient douteuses auparavant, se montrent aujourd’hui comme coupables. Bien des plaisirs dont nous jouissions doivent être maintenant abandonnés, parce qu’ils n’apportent plus la joie, mais la condamnation. Une foule de choses soi-disant innocentes se révèlent comme néfastes à celui qui ne veut plus faire sa propre volonté, mais celle de celui qui l’a envoyé».

Le changement de but intervenu dans notre vie – («vous ne vous appartenez pas à vous-mêmes») – ne tarde pas à produire un changement d’opinion quant à l’emploi légitime du temps, des talents et de la fortune confiés à notre administration. Nous renonçons de plein gré à bien des choses que nous nous accordions ou que nous recherchions, parce que nous les voyons sous un jour entièrement nouveau, étonnés d’avoir pu les envisager autrement et surpris que d’autres puissent avoir une autre manière de voir à leur sujet. Alors la séparation d’avec les choses nous conduit à un certain isolement des hommes. La différence des désirs élève des barrières aussi sûrement que leur similitude fait naître l’accord. Quand la communauté d’intérêts disparaît, on voit combien l’amitié en dépendait.

L’homme consacré sera le dernier à s’éloigner de ses semblables parce qu’il se croirait plus saint qu’eux ; au contraire, il cherchera plus que jamais l’affection de tous ; il est rempli d’amour au delà de toute expérience antérieure. Mais le milieu change, les amis se dispersent et un sentiment d’isolement se glisse dans le cœur.

Une partie du sacrifice que nécessite la volonté arrêtée de gravir les plus hauts sommets de la consécration et de la communion avec Dieu, consiste dans la perte de la compagnie de ceux qui ne veulent pas venir avec nous. La dépense paraît élevée, mais comme elle est nécessaire pour gagner le prix, il vaut la peine de la payer. Mieux vaut mille fois la séparation d’avec le monde que celle d’avec Dieu. Sachons préférer l’isolement d’Enoch à l’entourage de Lot. Il y a souvent un grand danger à ce qu’une fausse conception du «tout à tous» nous empêche d’être quoi que ce soit pour personne. La séparation, c’est l’isolement, mais l’isolement est une puissance dans la sphère spirituelle. Les cœurs qui cherchent aide et lumière ne les cherchent pas auprès de ceux qui sont à leur niveau, mais auprès de ceux qui marchent sur les sommets de la vie chrétienne. Si l’isolement est la part de la vie consacrée parce qu’elle marche consciencieusement près de Dieu, qu’il soit le bienvenu. Il en résultera une communion plus intime avec le grand Isolé qui a été le seul aide véritable que le monde ait connu.

Souffrance.

A la purification et à l’isolement, est liée la souffrance. Il y en aura plus ou moins dans toute vie livrée. Tandis que l’homme nouveau demeure dans les lieux célestes, le vieil homme est mis en croix et doit y rester. La vie livrée a donc un double aspect. Elle est liée au Christ ressuscité d’une part, au Christ crucifié de l’autre, en sorte que notre expérience a un double caractère. Dans le progrès constant de notre communion à Christ, Dieu juge bon de s’occuper de notre vieux moi aussi bien que de Christ qui vit en nous. Crucifixion d’un côté, résurrection de l’autre. Nous portons à la fois sa croix et son joug. Nous éprouvons la souffrance de la première aussi bien que la douceur du second. Le joug de l’obéissance est aisé quand le moi est en croix. Mais avant tout le moi souffre d’être crucifié, et il faut qu’il en soit ainsi. Au temps de la souffrance, quand Dieu agit en nous par la croix, restons patients, car assurément après l’épreuve une plus grande puissance sera manifestée dans notre vie de ressuscités avec Christ. Souvenons-nous toujours que nous portons partout avec nous le vieil homme à la place qui lui est due, la croix, et que cette place où il meurt doit nécessairement être pour lui un endroit de souffrance. Quelle mesure de souffrance faudra-t-il pour le bien de chacun d’entre nous ? Dieu seul le sait et en décide. A mesure que nous approchons davantage du point culminant de notre communion avec le Ressuscité, des mouvements subtils de notre vie propre nous sont révélés dont Dieu attend que nous les soumettions à la croix. Ce fait même nous donne l’assurance qu’à mesure «que nous portons toujours avec nous la mort (acte de mourir) du Seigneur Jésus, la vie de Jésus sera aussi manifestée dans notre corps mortel» (2 Cor 4:10).

Service.

Dieu ne manque pas d’appeler à son service la vie qui lui est livrée. Ce service est notre suprême privilège ici-bas. Quand nous nous livrons au Seigneur, nous nous mettons à sa disposition et dorénavant «nous sommes ses serviteurs».

Il serait bien étrange de devenir serviteur sans trouver de service. Si donc nous attendons avec patience, il nous fera sûrement trouver l’œuvre qui nous a été préparée. Car nous sommes membres de son corps et il désire réaliser par nous sa volonté envers un monde perdu.

Ce ne sera peut-être pas le service actif que nous nous étions proposé. Peut-être a-t-il pour nous un ministère de prière, de patience et de souffrance en son nom. Mais la forme de service la plus élevée sera celle qu’il aura choisie, quoi qu’elle puisse être pour nous.

Certainement l’éternité révélera, si le temps ne le fait pas, qu’en agissant ainsi nous avons glorifié Dieu d’une manière parfaite. L’enfant de Dieu consacré peut donc en toute confiance attendre que Dieu lui révèle l’œuvre de sa vie et l’y conduise. Sa force sera dans le repos et la confiance, il ne sera pas confus. Le ministère que Dieu lui a choisi de toute éternité en Christ lui sera peut-être révélé brusquement comme un éclair, ou bien pas à pas, d’une manière progressive, par l’élargissement insensible d’un travail accompli dans l’humilité jusqu’au moment où l’œuvre de sa vie se trouve devant lui. Par la joie qu’il trouve à ce ministère, par la manière dont il s’adapte à ses facultés, par le mouvement de ses pensées qui s’y reportent sans cesse, par le sceau de succès que Dieu y appose et le sentiment toujours plus précis que Dieu l’y appelle, l’Esprit lui donne l’assurance qu’il est bien à la place voulue de Dieu.

Bienheureux celui qui, ayant entendu la voix de Jésus lui dire : «Voilà le chemin, marches-y», se charge joyeusement de son joug pour aller avec lui jusqu’à ce qu’il puisse dire, lui aussi «J’ai fini l’œuvre que tu m’avais donnée à faire». Séparé de Dieu, il ressemble à un vaisseau abandonné sur l’océan, flottant sans pilote, n’ayant ni port ni but. Mais une fois livré à Dieu et après avoir trouvé la place qui lui est préparée, il avance comme un vaisseau bien chargé, muni de sa boussole, poussé par un vent régulier, ayant sa route bien tracée et voguant vers un port connu où la voix aimée de son Maître réjouira son cœur par un : «Cela va bien… tu as été fidèle… je t’établirai sur beaucoup».

Je puis attendre tout cela de Dieu après m’être livré à lui. Mais qu’est-ce que Dieu est en droit d’attendre de ma part dès que je suis son serviteur consacré ?

Une marche fidèle dans la foi.

Je dois cesser de dépendre de moi-même, pour me confier dorénavant en Dieu et me reposer sur le Christ qui habite en moi. J’ai appris qu’il n’y a pas un atome de vie spirituelle en moi et que l’unique source de la vie est dans le Fils de Dieu qui habite en moi par l’Esprit. En dehors de Christ qui habite en moi, je suis un indigent au point de vue spirituel. Le seul grand. axiome de ma vie nouvelle doit être : Confie-toi en Christ qui est en toi. Il est ma sagesse, ma vie, ma lumière. Il m’affirme que l’Esprit qui habite en moi a pris charge de ma personne. L’Esprit guidera ; l’Esprit enseignera ; il purifiera ; il révélera Christ ; il me rendra capable de servir ; il parlera par moi ; il accomplira par moi les œuvres de Dieu. Il fera en tous temps tout ce dont ma vie a besoin pour croître en Christ.

Pendant mon ancienne vie, j’élaborais plans et projets et je me tourmentais dans mon travail journalier. Dans ma vie nouvelle, je remets tout à Christ. Dans l’ancienne vie, je me fiais à ma force, à mon jugement, à ma sagesse. Dans la nouvelle, c’est à sa force, à son jugement et à sa sagesse que je me confie, je me repose en lui. C’est lui qui a maintenant toute la charge. Les rênes sont entre ses mains. Il est le maître, je suis l’écolier ; il est l’ouvrier, je suis l’instrument ; il est le potier, je suis l’argile. Je serai donc maintenant en la possession et sous la direction de l’Esprit dans une mesure qui m’était inconnue avant que j’eusse renoncé à la possession de moi-même.

J’ai à présent devant moi la plus grande leçon de l’école de la foi, celle de me défier constamment de moi-même en regardant toujours à Jésus. Je ne compte plus sur moi pour rien, mais sur lui pour tout. Je ne suis plus seulement justifié par la foi, mais j’apprends à réaliser que «le juste vit par la foi». Jésus-Christ dit : «Je suis la vie«. C’est pourquoi je regarde constamment à lui, je m’attends à lui toujours, je vis en lui par la foi. Le pécheur justifié dit : «J’ai eu confiance et j’ai reçu la vie par toi» ; celui qui s’est livré dit «J’ai confiance et je compte constamment sur ta vie en moi». A sa déclaration «je suis la vie», correspond la mienne : «Seigneur, je vis par la foi en toi». Même la vie qui anime les cieux est une vie de dépendance, «un fleuve d’eau vive sortait du trône de Dieu et de l’Agneau» (Apoc 22:1).

Si telle a été la vie du Fils de Dieu, et que telle doive être la vie des rachetés dans les cieux, combien plus sera-ce ma vie à moi, son faible enfant, sur la terre. Il faut que mon Guide patient m’enseigne ligne par ligne et paragraphe par paragraphe la leçon si difficile de me défier constamment de ma chair pour me confier constamment en Christ qui est en moi. Il le fera à travers bien des fautes et des bévues de ma part, mais il n’est jamais las d’enseigner, et par sa grâce je parviendrai certainement à apprendre et à connaître quelque chose de l’expérience bénie de l’homme de Tarse, révélant son grand secret : «Je vis dans la foi» (Gal 2:20).

L’accomplissement journalier de la volonté de Dieu.

Je dois accepter la volonté de Dieu. Cette volonté de Dieu sera désormais ma règle pour la direction de ma vie. Je n’ai plus à me demander ce que j’aimerais faire, mais ce que Dieu désire que je fasse. Et dès lors la Parole de Dieu, comme révélation de cette volonté, prendra dans ma vie une place toute nouvelle. J’accepte cette Parole comme lampe à mes pieds et lumière sur mon sentier. Je l’accepte, quelque contraire qu’elle soit à ma pensée ou à mon désir. Je l’accepte, quoi qu’on fasse pour m’en dissuader.

Quand cette Parole dit :

«Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous outragent et vous persécutent»,

je l’accepte et je mets en pratique cette volonté de Dieu, quelque absurde et impraticable qu’elle paraisse aux yeux du monde. Quand cette parole dit :

«Déchargez-vous sur lui de tous vos soucis, car il a soin de vous»

, j’accepte cela comme sa volonté et je le mets en pratique aussitôt. Quand cette parole dit :

«Mon Dieu pourvoira à tous vos besoins»,

j’abandonne toute inquiétude en ce qui concerne mes besoins et je m’attends à Dieu pour qu’il y pourvoie.

En étudiant la Parole de Dieu, je suis saisi par telle vérité avec laquelle ma vie de tous les jours n’est pas d’accord. Je n’ai pas le droit d’avoir le moindre doute, mais je dois y conformer immédiatement ma conduite. Accepter ainsi la volonté de Dieu, telle qu’elle est révélée dans sa Parole et la faire passer dans sa vie, est une méthode qui remue jusqu’au fond le cœur de l’enfant de Dieu consacré. Il favorise comme rien autre ne peut le faire une croissance spirituelle rapide. Il nous remplit d’étonnement à la vue de la distance qui s’étend entre notre vie et la volonté de Dieu.

Je dois ensuite me soumettre patiemment à la volonté de Dieu. Être patient, signifie littéralement «se tenir dessous». Comme le diamant brut reste sous la meule du polisseur, je me tiens tranquille sous la main de Dieu quoi qu’il m’arrive. A la place de l’expérience spirituelle exaltante que j’attendais, il est possible que je rencontre la souffrance, des épreuves terribles, de mystérieuses dispensations, des ténèbres, un avenir incertain. Mon devoir alors est de me tenir sous la main de Dieu en disant : «Que ta volonté soit faite dans les jours difficiles comme dans les bons». J’apprends à être content en quelque état que je me trouve. Combien n’y en a-t-il pas qui sont disposés à se tenir sous la main de Dieu pour le servir, mais pas pour être purifiés. Ils sont prêts pour la bataille, mais pas pour la fournaise ou pour la forge. Prêts pour le ministère, ils ne le sont pas pour supporter patiemment tout ce que Dieu envoie ou permet dans leur vie. Et pourtant la consécration consiste à se soumettre au genre d’expérience choisi par Dieu comme devant aider à notre éducation. Il permit que son propre Fils fût soumis par l’adversaire à des tentations terribles dès le début de son ministère. Le serviteur n’est pas plus grand que son Maître. Dieu sait ce qui nous vaut le mieux. Ainsi donc, j’ai à me soumettre à tout ce qui m’arrive après ma consécration, quelque inexplicable que soit la chose et quelque difficile à supporter que soit l’épreuve, car c’est ce qui vaut le mieux pour ma purification et pour le développement de ma vie chrétienne.

La circonstance présente, si pénible qu’elle soit, sera entre les mains du Père (si vous êtes consacré à Christ), l’instrument le mieux approprié pour vous ciseler pour l’éternité. Ayez donc confiance et ne repoussez pas le ciseau tranchant, crainte de perdre le fruit de son travail. Considérez combien toute autre attitude est déraisonnable. Un jour je me livre à Dieu pour faire sa volonté plutôt que la mienne. Le lendemain survient la tentation, l’épreuve, la souffrance. Et voilà que, me révoltant, je doute de ma consécration, de Dieu lui-même. C’est-à-dire que moins de vingt-quatre heures après avoir dit : «Seigneur, non pas ma volonté, mais la tienne», je romps le pacte fait avec lui, parce qu’il est entré dans ma vie quelque chose qui n’est pas «selon ma volonté». Rappelons-nous toujours que le but suprême de la consécration c’est précisément de vivre la soumission que j’ai promise et que c’est là exactement ce que je fais en me soumettant patiemment à tout ce qui touche ma vie.

J’ai à faire la volonté de Dieu. Si pour un contrat défini j’offre mes services à un patron, il est simplement honnête de ma part d’accomplir fidèlement jour par jour la tâche à laquelle je me suis engagé. La consécration est-elle autre chose ? C’est (voir chap. 1)

«le don volontaire de nous-mêmes à Dieu pour faire sa volonté au lieu de la nôtre».

Je me suis engagé à cela, que cela se fasse donc. Aucune autre manière de faire ne serait honnête vis-à-vis des hommes ; aucune autre ne peut l’être à l’égard de Dieu. Accepter, me soumettre et faire heure par heure sa volonté, voilà quel sera dorénavant l’unique but de ma vie. Le Fils disait : «Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé». Ce doit être la nôtre aussi. Par elle, nous serons fortifiés ; sans elle, nous deviendrons faibles. Nous souvenant du but sublime de la vie du Fils : «Voici, je viens pour faire ta volonté», nous aussi, comme des fils consacrés, nous marcherons vers ce seul et suprême but de notre vie terrestre, qui restera le but de notre vie éternelle dans les âges à venir ; «le monde passe avec ses convoitises, mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement».

Exemple d’une vie livrée.

Pensées suggérées par la mort de P. Cameron Scott, fondateur de la Mission de l’Afrique intérieure.

«Bien-aimés, nous sommes dès maintenant enfants de Dieu«. Ressuscités d’entre les morts, assis dans les lieux célestes, destinés à régner avec Jésus-Christ, nous avons dès ici-bas une vie de privilèges infinis. C’est une vie de service loin du monde ; de paix et de puissance ; de communion consciente avec Dieu ; d’approbation de sa part ; de joie débordante et de travail fertile ; de triomphe sur l’habitude du péché ; une vie riche, bénie, précieuse et puissante en Jésus-Christ ; une vie qui descend, par l’action de l’Esprit, du Dieu de toute grâce, de toute gloire et de toute puissance ; – la vie livrée à Dieu. Et c’est à cette vie que l’appel de Dieu nous invite tous ; aucun n’en est exclu ; tous sont appelés à servir ; tous ont été créés en Jésus-Christ pour les bonnes œuvres, «que Dieu a préparées afin qu’ils y marchent» ; «il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent, ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour lui» ; c’est à tous qu’il dit : «Je vous exhorte, frères, à offrir vos corps en sacrifice vivant».

Pendant plusieurs années, Cameron Scott se laissa ballotter sur les flots d’une vie de christianisme frivole, sans penser, semblait-il, au droit que Dieu avait sur lui. Il avait bien entendu prêcher Christ mis en croix pour les pécheurs, mais jamais des lèvres passionnées n’avaient répandu dans son cœur, en de brûlantes exhortations, le message souverain de Christ à ses enfants, – message qu’enfante le travail de son âme, – «mon enfant, j’ai besoin de ta vie«. Et il en est ainsi de myriades de vies. L’Église de Jésus-Christ est tombée dans une erreur fatale en regardant comme suffisantes la qualité de membre d’une église, la fréquentation du culte, la participation aux moyens de grâce ou aux œuvres qu’elle poursuit, au lieu de réclamer pour Dieu la consécration absolue de la vie et de la volonté.

Lecteur, serais-tu peut-être aussi depuis des années un enfant de Dieu sans que ce message soit jamais parvenu à ton cœur et à ta conscience avec la conviction, la puissance et l’autorité dont il doit être accompagné ? Ou bien hésiterais-tu parce qu’il signifie sacrifice, crucifiement, et dirais-tu : «Je ne suis pas prêt à cela ?» Examine, je t’en prie, ton raisonnement ; n’est-ce pas dire : «J’accepte la croix pour la rémission de mes péchés ; mais je n’en veux point pour y être crucifié moi-même. Une croix pour Christ, mais point pour moi ! Mes péchés jetés sur le corps de Christ – volontiers ; mais ma vie mise aux pieds de Jésus – jamais ! Pour lui une croix sanglante ; pour moi une croix couverte de fleurs. La cime dorée d’un clocher d’église, ou le bibelot suspendu à mon cou, me suffisent !» C’est ainsi que trop souvent nous acceptons la croix pour notre salut en dédaignant celle de notre consécration. Paul voyait deux croix : ou plutôt la même croix sous un double aspect. La première, une croix sur laquelle Christ était cloué pour lui (Col 1:20) ; la seconde, sur laquelle il était lui-même avec Christ (Gal 2:20). Le pécheur doit forcément accepter la première, le croyant n’a pas le droit de refuser la seconde. S’il la refuse, ce sera pour lui une perte incalculable, car c’est ainsi seulement qu’il pourra recevoir la plénitude de la paix et de la puissance dont nos âmes ont soif. Elles sont nombreuses les inventions modernes que l’on substitue au vieux chemin de la consécration, mais elles aboutissent toutes à la fange d’un égoïsme stérile, au lieu de nous conduire à la puissance auprès de Dieu et auprès des hommes. En vérité, à moins que l’Église de Christ ne prêche au croyant la croix de la séparation et de la consécration aussi fidèlement qu’elle prêche au pécheur la croix du salut, elle perdra dans sa vie facile, nonchalante et mondaine, la chaleur de son sang, la flamme de son cœur et la puissance de sa foi.

Il vient un moment pour chaque croyant où le Saint-Esprit travaille puissamment son cœur pour le presser de livrer sa vie. Cela encore ressort clairement de l’expérience de Cameron Scott. Dieu se servit à son égard de déceptions, de maladies, d’afflictions temporelles, pour le convaincre de la vanité du monde et produire en lui le désir d’une connaissance plus approfondie de Christ, qu’il ne servait que de nom. L’Esprit revint à la charge à mainte reprise et le troubla par cette parole : «Vous ne vous appartenez pas à vous-mêmes, vous avez été rachetés à grand prix«, jusqu’à ce qu’enfin il livra sa vie à celui qui l’avait racheté par son propre sang. Ici encore, sa vie est-elle autre chose que l’image de toutes celles qui ont été rachetées par Dieu ? Le Saint-Esprit n’a-t-il pas opéré tendrement et patiemment dans vos vies depuis bien des années ? Bien-aimés, n’avezvous pas été inquiets, dégoûtés du monde, mécontents de votre vie spirituelle, avides d’une vie plus riche qui constituait votre héritage légitime ? N’avezvous pas eu des visions de sommets que vos pieds n’avaient jamais foulés ; de chants d’allégresse que vos lèvres n’avaient jamais chantés ; d’une communion intime et précieuse avec Jésus qui n’avait jamais été réalisée ; d’abondance, de fertilité, de service joyeux inconnus jusqu’à ce jour ? Est-ce que vous ne caressez pas au fond de votre cœur un idéal que rien n’a pu détruire, malgré les injures qu’a subies votre bourgeoisie céleste dans le milieu tiède et mondain qui vous entoure ? Qu’est-ce que cela signifie ? Simplement ceci : que le SaintEsprit, chargé de prendre ce qui est à Christ pour nous l’annoncer, a entretenu devant vos yeux une vision de Christ, non seulement comme Sauveur, mais comme Homme-Dieu, renonçant au monde et à lui-même, comme Fils de Dieu consacré, et vous a invité à le suivre dans cette voie. C’est là qu’est le secret du malaise mystérieux de votre âme. C’est le Saint-Esprit. Il vous presse de faire ce pas décisif de votre vie chrétienne qui y multipliera la bénédiction : votre entière consécration. Résistez-vous encore ? Pendant que Cameron Scott était travaillé jour et nuit par ces mots : vous ne vous appartenez pas à vous-mêmes, il fut si angoissé dans son âme, qu’il chercha à les effacer de sa Bible ! Bien-aimés, résistez-vous au Saint-Esprit ? Avez-vous repoussé cette vérité de vos vies ? ce qui serait bien pire que de l’effacer de vos Bibles. N’estil pas vrai que, lorsque nous laissions notre vie chrétienne descendre graduellement à quelque chose de plus mondain, une voix intérieure ne cessait de protester au-dedans de nous et cherchait à nous persuader de rencontrer la vérité ? Prenons garde ! «Le cœur est trompeur et désespérément malin». En résistant ainsi, il pourra arriver que nous soyons pendant des années au seuil d’une bénédiction que nous n’atteindrons jamais ; nous pourrons entrevoir un pays de la promesse que nous ne pourrons jamais fouler.

 

Quand nous avons cédé au Saint-Esprit, la consécration de notre vie à Dieu est suivie de bénédictions indicibles. Il en fut ainsi pour Cameron Scott. Il fut transformé. Ses lèvres furent ointes de puissance divine ; son cœur fut touché de compassion pour les âmes perdues ; de la médiocrité de ses pensées, sa vie fut élevée à la hauteur des plans de Christ ; sa spiritualité grandit par bonds puissants ; la Parole de Dieu et la prière secrète devinrent pour lui des sources de joie débordante, toute sa personne rayonnait d’une ardente piété, jusqu’à ce qu’enfin cette vie intense se consumât pour son Seigneur et son Roi. Et cela chez un homme qui avait cherché à effacer de sa Bible un texte de consécration ! Enfant de Dieu, vois donc la transformation que la grâce de Dieu peut accomplir dans une vie livrée et sache avec une entière certitude qu’il est prêt à la produire en toi, si tu te livres à lui. La puissance que tu désires ; la séparation d’avec le monde ; la vie en Christ ; une communion intime et consciente avec lui ; le zèle pour le sacrifice ; un service heureux à la place que Dieu t’a préparée, la joie, la paix, une bénédiction dépassant toutes tes espérances, tout cela te sera donné quand tu auras livré ta vie.

Si l’ami disparu pouvait aujourd’hui s’adresser à nous de son séjour de gloire, il nous dirait, le cœur battant à l’unisson de celui du Seigneur ; comprenant que les souffrances du temps présent ne sont pas dignes d’être comparées avec la gloire de la vision du Fils de Dieu ; considérant les choses d’ici-bas à la lumière de l’Eternité : «J’ai été en la présence de l’Homme qui mourut pour nous, j’ai vu sa gloire ; mes regards se sont portés sur son côté percé, son front déchiré ; je sais maintenant ce que cela signifie d’aimer jusqu’à la mort. Quand je le servirais pendant une série d’éternités, je ne pourrais jamais lui rendre ce que j’ai reçu de lui ; quand j’aurais mille vies, je les déposerais toutes à ses pieds. Après avoir vu ce qu’il a fait pour moi, ce serait pour moi un supplice inexprimable que de revenir dans ce monde sans m’offrir en sacrifice vivant. Je vous conjure, enfants de Dieu, qui vivez encore sur terre, par les richesses incommensurables de son amour, que vous ne gardiez pas pour vous-mêmes une once de vos trésors, une parcelle de vos talents, un atome de vos forces, une seconde de votre temps, un soupir de votre amour. Ceux qui sont ici et n’en ont donné qu’une partie, voudraient bien avoir tout donné, et ceux qui ont tout donné voudraient bien avoir eu davantage à donner. Ne pensez pas que vous puissiez jamais lui consacrer trop. Quand chaque goutte de notre sang serait répandu, quand toutes nos forces seraient consumées pour lui, chaque souffle dépensé en prière, en louange et en témoignage ; chaque moment fugitif mis à son service ; tout cela vous paraîtra une mesure bien faible de votre amour pour lui quand vous le verrez tel qu’il est. C’est pourquoi je vous exhorte, frères, par les compassions de Dieu, que vous offriez vos corps en sacrifice vivant, saint et agréable, ce qui est votre service raisonnable».

 

Et enfin la vie livrée est, dans le sens le plus vrai du mot, une vie sauvée. Quand le monde voit disparaître à la fleur de l’âge une vie offrant tant de capacités rares, de piété véritable et de vertus aimables, il s’écrie : «Quelle perte !» Mais en cela le monde ne fait que manifester sa profonde ignorance de cette maxime du royaume de Dieu, qu’on ne cueille du fruit que sur la plante du sacrifice ; que le royaume de Dieu ne s’étend pas par les vies sauvées, mais par les vies qui sont perdues aux yeux du monde. La vérité de Dieu est celle-ci : «Quiconque veut sauver sa vie la perdra ; mais quiconque perd sa vie pour l’amour de moi la trouvera». Voici venir un laboureur avec deux mesures de grain doré. Et quelqu’un de lui dire : «Ne le jette pas ; garde-le ; prends-en soin ; ménage-le pour le temps de la famine, où chaque grain sera précieux». Il l’écoute et il amasse son grain dans son grenier. Mais voici quelqu’un d’autre qui lui dit : «Prends une mesure de ce blé et jette-le à profusion dans la terre humide. Sois prodigue, ne l’épargne pas, lance-le de tous côtés et laisse-le mourir». Ce conseil est aussi suivi et les gens soigneux et avares, qui regardent avec approbation l’accumulation du grain lourd, se tournent ahuris vers le grain épars, enfoui dans le sol, et s’écrient : «Quelle perte !» Mais les mois se suivent ; voici la moisson ; une fois encore, comme toujours, la folie de Dieu se montre plus sage que les hommes. Au grenier, nous retrouvons le grain qui a été conservé, mais il n’a pas augmenté d’une once, au contraire, il a séché, il s’est moisi. Mais regardez le champ transformé où le blé perdu, vilipendé, a trouvé son tombeau. En rangs serrés, une multitude innombrable d’épis se courbent et se balancent sous la charge du grain doré et attendent joyeusement que la faux du moissonneur les recueille pour en nourrir un monde affamé. Et si votre oreille attentive pouvait saisir le mystère de ce miracle d’abondance, chaque épi vous confierait doucement : «A mes pieds il y a une tombe minuscule, dans cette tombe un grain de blé a sacrifié sa vie ; et c’est de cette tombe qu’est sortie mon abondance. Ne sais-tu pas que le grain de blé reste seul, après être tombé en terre, s’il ne meurt pas ? Mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. C’est la loi du champ de blé».

Enfant de Dieu, le Maitre n’a-t-il pas proclamé cette loi comme celle de son royaume ? Les moissons éternelles de notre Dieu ne sortent jamais que de la consécration et de la mort à nous-mêmes. C’est le travail pénible, ce sont les difficultés et le sacrifice, les larmes, les souffrances et les cris de détresse d’une vie livrée qui les produisent. Et c’est cette vielà qui est une vie sauvée. Au contraire, si votre vie est égoïste, absorbée par la recherche des trésors d’icibas, des ambitions terrestres et des plaisirs de ce monde, si elle ne se passe qu’à manger, qu’à boire et qu’à prendre ses aises, quand bien même votre âme serait sauvée, votre vie n’est-elle pas perdue pour Dieu ? Il ne peut pas la purifier ; il ne peut pas l’inspirer et la rendre puissante ; il ne peut pas la guider de ses conseils ; il ne peut la charger de sa bénédiction pour le travail qui lui est préparé en Christ ; il ne peut pas la répandre dans le champ du monde pour qu’elle y porte du fruit pour le temps et l’éternité ; si cette vie ne lui est pas livrée, comment le pourraitil ? N’est-elle pas perdue pour lui dans ce monde ? Pour autant que cela dépend d’elle, l’accomplissement des desseins de Dieu à l’égard de ta génération n’est-il pas arrêté et compromis ? Est-ce qu’une vie semblable te contente ? Contente-t-elle Jésus ? J’admets que tu es sauvé, mais te contenteras-tu d’être tout juste sauvé «comme à travers le feu» ? N’as-tu aucun désir de porter du fruit pour lui ? de déposer quelques trophées à ses pieds ? Si la consécration de ta vie – pauvre compensation de son amour ineffable – est néanmoins pour lui un sacrifice d’agréable odeur, n’écouteras-tu pas les supplications qu’il t’adresse ?

«Frères, le temps est court ; que ceux donc qui ont des femmes soient comme s’ils n’en avaient pas ; ceux qui pleurent comme s’ils ne pleuraient pas ; ceux qui sont dans la joie comme s’ils n’y étaient pas ; ceux qui achètent comme s’ils ne possédaient rien ; et ceux qui usent de ce monde comme n’en usant pas ; car la figure de ce monde passe«. Le Seigneur est près. Le voile léger qui sépare le temps de l’éternité, tremble au souffle de celui qui vient. S’il survenait ce soir pour vous enlever dans la gloire, serviteurs non consacrés et mondains dont les mains sont souillées à force de remuer les vanités de ce monde, dont les lèvres sont encore entrouvertes du dernier refus opposé à ses supplications, ne seriez-vous pas «honteux devant lui à sa venue ?» Êtes-vous encore hésitants ? faites-vous encore des compromis ? votre chair a-telle encore des tendresses pour ce monde ? Le faux éclat des bibelots terrestres n’a-t-il pas encore pâli devant la vision du Crucifié ? Votre cœur ne s’est-il pas encore écrié : «Oh ! Galiléen, tu m’as vaincu !» Pouvez-vous à la fois convoiter des prix terrestres et gagner le céleste ? Pouvez-vous marcher selon la chair et marcher en même temps avec lui ? Vous est-il permis de poursuivre les mêmes plaisirs, de soupirer après les mêmes richesses et de servir le même maître que les mondains avoués ? Bien-aimé, oh ! cède, livre-toi entre ses mains. Sinon, cette vie humaine qu’il t’a confiée et que tu ne peux vivre qu’une fois, passera rapidement comme la flèche ailée et tombera brisée et sans résultat aux pieds de celui qui désirait en faire une arme de choix, si seulement tu avais voulu te livrer à lui.

 

L’offrande du croyant.

Quel trésor de vérités que ce seul verset ! Comme la rose ouvre ses pétales à la lumière du soleil, ainsi s’ouvrent sous la lumière du Saint-Esprit les quatre principes contenus dans ce passage : Consécration ; Transformation ; Révélation ; Ministère.

Consécration.

Ils se sont donnés premièrement eux-mêmes au Seigneur.

Il n’existe pas de mains aussi sûres que celles de Dieu pour façonner et garder nos vies. Il a fait le plan de ces vies en Jésus-Christ dès avant tous les âges. Il connaît leur force et leur faiblesse ; il sait comment les former utilement pour leur but ; il sait la place qu’il leur a préparée ; il connaît les limites et les capacités de ces vies ; il sait comment elles peuvent le mieux ici-bas glorifier son nom, avancer son règne et acquérir ainsi une influence éternelle. Sachant cela, les Macédoniens n’essayèrent pas de façonner ces vies à leur manière et selon leurs désirs et leurs plans particuliers, pour en remettre les fragments à Dieu après des années d’erreurs et de désappointements. Ils remirent ces vies à Dieu premièrement, avant de les avoir gâtées par tous leurs essais malheureux.

Ceci nous rappelle l’heure critique que traversa un jeune ami, il y a de cela peu d’années. Brillamment doué, aimable, pur de cœur, rempli de nobles pensées, il était arrivé à la bifurcation de la route. C’était, d’une part, la vocation terrestre qui s’offrait à lui, avec ses prix éblouissants et la satisfaction des plus grandes ambitions. L’autre voie était celle de la consécration au Seigneur, avec tous les sacrifices, le travail et le renoncement qui y sont compris. Là, dans sa chambre, sous les rayons d’un brillant soleil qui pénétraient par la fenêtre et qui baignaient son corps incliné, le jeune Hugh Beaver choisit cette dernière voie et se donna lui-même premièrement au Seigneur.

Trois courtes années après, nous entourions son cercueil, contemplant sa douce figure, déjà pâle et rigide. Nous nous rappelions la beauté de sa vie de serviteur de Dieu, la puissance de ses prières, la grande influence qu’il avait exercée sur les jeunes gens de son collège, et son ministère à Northfield, où des centaines de jeunes femmes cultivées étaient assises aux pieds de ce jeune maître, l’Esprit de Dieu agissant par lui jusqu’au fond de leurs âmes ; et nous réfléchissions à tout ce que les personnes influencées par cette jeune vie eussent perdu, si notre ami s’était donné au monde au lieu de se donner à Dieu. A cette heure solennelle, nous comprîmes tout à nouveau la nécessité pour chaque enfant de Dieu de se donner à lui premièrement.

Combien coûteuses sont les erreurs que nous commettons à cet égard ! Cette vie que nous ne pouvons vivre qu’une fois ; cette vie durant laquelle chaque expérience manquée est synonyme de perte éternelle ; cette vie, le dépôt le plus précieux qui puisse être remis à la garde d’un homme, nous osons, en y portant nos mains, la détourner de sa destination éternelle pour nous en servir dans un but égoïste ! Qu’un enfant essaie de faire fonctionner le mécanisme délicat et compliqué d’une grande locomotive, dont il ne connaît absolument rien, la grande machine part à l’aventure, semant la ruine et la destruction sur son passage. De même, quand nous voulons disposer de nos vies, sans égards pour les droits que le Seigneur a sur elles, nous ne pouvons attendre que les conséquences les plus amères déceptions, plans frustrés, obscurité, perte de la présence de Dieu, souffrances de toute nature, banqueroute physique, mentale, spirituelle. Puis après des années de fautes et d’erreurs, nous remettons à Dieu le reste de nos vies pour en faire ce qu’il peut.

Et pourtant même alors combien le Seigneur est bon ! Que sa grâce est infinie, son amour tendre ! Sans un mot de reproche, il daigne prendre ce qui reste en plaçant tout le passé sous l’aspersion du sang de Jésus. Il emploie au mieux ce que nous lui livrons et il sait encore en tirer sa gloire au delà de ce que nous pouvons penser. Souvenons-nous toutefois que, si ces années de désappointements et de souffrance ont été nécessaires pour nous amener à lui, et qu’il n’a pu obtenir dans notre vie qu’un résultat relatif, le mieux reste toujours d’imiter les Macédoniens, qui «se sont donnés premièrement eux-mêmes au Seigneur» et ensuite à l’œuvre préparée pour eux «selon la volonté de Dieu».

Transformation.

Soyez transformés. (Rom 12:2).

Chez les Macédoniens comme chez tous les enfants de Dieu, la consécration est suivie de transformation. Quand ils remirent leurs vies entre les mains de Dieu, ils furent remplis de l’Esprit de Dieu. Point n’est besoin de trop lire entre les lignes pour discerner chez eux cette grande vérité qu’annonce notre texte. Remarquez les mots de plénitude et de transformation : «Vous abondez dans la foi, la parole, la connaissance ; la promptitude de la bonne volonté ; votre abondance, votre libéralité ; au delà de leur pouvoir, remplis de joie ; etc».

Comme c’est clair et comme c’est conforme à l’amour de Dieu, à la volonté de Dieu, à la parole de Dieu, que tous ses enfants reçoivent comme les Macédoniens une vie de plénitude ; que ceux qui ont reçu l’Esprit lors de leur nouvelle naissance reçoivent sa plénitude à leur consécration. La parole de Dieu abonde en textes démontrant le désir de Dieu d’accorder sa plénitude à ses enfants. «Heureux ceux qui ont faim et soif, car ils seront rassasiés» ; «soyez remplis de l’Esprit» ; «et nous avons reçu de sa plénitude» ; «ils furent touts remplis du SaintEsprit» ; «afin que vous soyez remplis de la plénitude de Dieu». Et le Seigneur lui-même dit : «Je suis venu afin qu’ils aient la vie et qu’ils l’aient même avec abondance» ; «l’eau que je lui donnerai deviendra en lui source d’eau, qui jaillira jusqu’à la vie éternelle». Et encore (Actes 2:17), le Saint-Esprit dit par Pierre : «Je répandrai de mon Esprit». La volonté de Dieu pour notre vie en Christ n’est pas la parcimonie, mais l’abondance ; ce n’est pas la pauvreté, mais la richesse ; ce n’est pas la faiblesse, mais la force ; ce n’est pas la rareté, mais la plénitude. Comme la source de la montagne répand ses flots rafraîchissants ; les tuyaux de l’orgue leurs flots de mélodie ; les cieux leurs ondées bienfaisantes, de même la volonté de Dieu répandra la plénitude de l’Esprit sur ses enfants. Mais remarquez (verset 18) sur qui cet Esprit est répandu : «Je répandrai de mon Esprit sur mes serviteurs, c’est-à-dire mes esclaves«. C’est donc sur ses serviteurs, sur ses esclaves, ceux qui lui sont complètement consacrés et qui ont absolument renoncé à leur volonté pour faire la sienne ; c’est sur eux que l’Esprit sera répandu dans toute sa plénitude de vie, de lumière et de puissance. Sur Jésus, Dieu répandit son Esprit «sans mesure». Mais de sa plénitude nous le recevrons, sinon au même degré, certainement dans sa même force, si auparavant nous nous livrons complètement à Dieu, en lui disant comme il l’a fait : «Voici, je viens pour faire ta volonté».

Deux hommes se promenaient au crépuscule sur les rives d’un fleuve. L’un dit, citant le mot d’un ouvrier devenu célèbre dans le travail du règne de Dieu : «Le monde n’a pas encore réalisé ce que Dieu pourrait faire d’un homme qui lui serait complètement consacré». Son compagnon, s’arrêtant, lui dit : «Répète cela». Et avec une nouvelle emphase, son ami répéta : «Il reste encore à réaliser aux yeux du monde ce que Dieu serait capable de faire au moyen d’un homme qui lui serait complètement consacré». Levant sa main dans le demi-jour, Dwight L. Moody, car c’était lui, dit : «Par la grâce de Dieu, je serai cet homme». Et il partit pour faire une œuvre de Dieu, telle que peu d’hommes en ont produit. Voilà le secret de la force du grand évangéliste. Complètement consacré à la volonté de Dieu, il fut transformé et rempli de l’Esprit de Dieu, et ainsi rendu capable de faire l’œuvre de Dieu. «Un homme de Dieu, à la place voulue de Dieu, faisant l’œuvre de Dieu à la manière de Dieu», voilà la désignation caractéristique de Hudson Taylor quant à la place que tout vrai serviteur de Dieu doit occuper dans la vie.

Mr F.-B. Meyer aussi parle du temps de sa vie où, jeune étudiant, il comprit cette vérité grâce au ministère de Mr Studd. Il parle du besoin intense que son cœur éprouvait d’une vie plus profonde en Christ, et il raconte comment le jeune étudiant de Cambridge insista sur le devoir et le privilège de pouvoir consacrer sa vie au Seigneur et sur la nécessité d’une confiance absolue en l’Esprit du Seigneur pour être transformé par lui. Et le grand prédicateur de Londres continue à relater comment il se rendit dans un bois, s’agenouilla dans le sanctuaire silencieux de la nature ; comment il livra sa vie à Dieu en toute simplicité, puis rentra chez lui, se fiant désormais au Saint-Esprit pour la direction de sa vie. Cet acte de foi et d’obéissance ne fut suivi d’aucun fait extraordinaire. Aucune extase ne lui fut donnée. Mais il réalisa dès ce moment la présence et la puissance de Dieu en lui et sa vie fut un déploiement merveilleux de la vertu divine. La consécration fut suivie de transformation. La foi complète fut suivie de plénitude. Son abandon à Dieu lui valut le ministère riche et béni qui attache au nom de ce serviteur un parfum de paix et de bénédiction pour des multitudes d’enfants de Dieu affamés de vérité.

«Jeunes gens, disait un saint homme, le missionnaire George Bowen, à des étudiants qui l’entouraient, la présence spirituelle de Jésus-Christ dans mon cœur, est plus réelle que votre présence, à vous qui êtes assis devant moi». La présence du Christ est-elle aussi réelle pour nous que pour ce pieux serviteur de Dieu ? Est-elle aussi réelle pour nous que les hommes et les choses qui nous entourent ? Sa vie nous remplit-elle comme la vie du monde remplit les gens du monde ? Sinon, pourquoi pas ? Notre Seigneur nous révèle, dans Jean 14:21, le mystère de sa vie abondante. Il dit bien clairement : «Je me manifesterai moi-même à vous». C’est son plan, son désir, sa pleine volonté de remplir ses enfants de sa plénitude. Et quel en est le secret ? «Celui qui garde mes commandements, je me manifesterai à lui». Et «c’est ici mon commandement, que vous vous aimiez les uns les autres». Et «personne n’a un plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis». Le plus grand commandement du Christ, c’est l’amour, l’amour du prochain. C’est pourquoi celui qui garde ce plus grand commandement, sera le plus près de Dieu. Or, l’amour suprême consiste à donner nos vies comme il a donné la sienne. Il en résulte que le don de notre vie à Dieu est la manifestation suprême de notre amour. Et comme notre consécration se perfectionne à mesure que la volonté de Dieu nous est toujours mieux révélée, ainsi il manifestera d’une manière toujours plus complète la plénitude toujours grandissante de son Esprit en nous. C’est dans la mesure où nous vivrons sa volonté que nous serons remplis de sa vie. En nous rapprochant de l’une, nous nous rapprochons de l’autre ; en faisant l’une, nous sommes remplis de l’autre. Si nous sauvons notre vie, nous perdons la plénitude de la vie de Christ. Mais en renonçant à notre propre vie, nous gagnons sa vie divine. Les Macédoniens avaient appris ce secret. Que le Seigneur veuille aussi nous l’enseigner !

Révélation.

D’abord au Seigneur et ensuite selon la volonté de Dieu.

Après s’être donnés eux-mêmes à Dieu, la volonté de Dieu à l’égard de leur vie leur fut révélée. Il en est toujours ainsi pour les enfants de Dieu. Après la consécration, la transformation ; après la transformation, la révélation. La consécration est suivie de la plénitude de la vie, et celle-ci apporte la plénitude de la lumière. Ce qui empêche la lumière de Dieu d’éclairer le plan de nos vies, ce n’est pas l’insuffisance de notre entendement, c’est notre volonté rebelle et insoumise.

Dieu a son plan pour chaque vie dans son royaume. Éph 2:10, il nous dit que «nous avons été créés en Jésus-Christ pour les bonnes œuvres, qu’il a préparées afin que nous y marchions». Pour son Fils Jésus-Christ, Dieu avait un plan parfait dès avant la création du monde. Il connut ce plan ; il s’y consacra ; il y marcha non seulement jour par jour, mais heure par heure, durant toute sa carrière terrestre. «N’y a-t-il pas douze heures par jour ?» dit-il, montrant ainsi que non seulement sa vie lui était mesurée jour par jour par le Père, mais que chaque heure dont il disposait faisait partie d’un plan parfait, s’étendant à tous les détails de sa vie. Et si Dieu avait un plan parfait pour Jésus, notre Seigneur, il en a un aussi pour chacun de ceux qui, à leur régénération, sont créés en Christ. S’il y a un plan pour le divin Chef du corps, il doit y en avoir un pour chaque membre de ce même corps. Et par la grâce de Dieu nous sommes de ces membres. Ainsi donc de toute éternité l’architecte divin a déposé dans les archives des cieux un plan parfait pour la vie de chacun de ses enfants dès son commencement et à travers son existence éternelle dans les âges à venir. «Il n’y eut jamais dans tous les siècles deux personnes absolument pareilles. Je suis unique. Je n’ai point de modèle». Combien c’est vrai pour vous qui êtes enfants de Dieu. Votre Père a pour vous un plan de vie nouveau, distinct de celui de tout autre être humain dans l’univers. Aucun homme ni aucune femme au monde ne peuvent faire l’œuvre préparée par Dieu pour vous. Il y aura une lacune dans la gloire du ciel, dans les fruits qu’elle doit porter, si vous ne trouvez pas le plan divin créé pour votre vie en Jésus-Christ et si vous n’y marchez pas. Pourquoi donc tant d’enfants de Dieu sont-ils ignorants de ce plan ? Pourquoi n’ont-ils jamais vu les bonnes œuvres dans lesquelles ils sont appelés à marcher ? Voici notre réponse sous la forme d’une image. Un homme arrive dans un grand établissement industriel pour y chercher un emploi. Il s’assied sur une borne dans la rue et passe là tout le matin. Vers midi, il s’approche du directeur et se plaint qu’on ne lui ait pas montré le travail qu’il devait faire. Le directeur va répondre au paresseux qu’il lui montrera le travail qu’il a pour lui aussitôt qu’il sera venu offrir son temps, son savoir et ses talents. «Car, ajoute-t-il, nous ne montrons pas nos plans et nous n’assignons pas de travail à personne à moins qu’il ne vienne se mettre à notre disposition. Jusqu’alors vous ne pouvez pas vous attendre à ce que nous vous montrions le travail que nous avons pour vous». N’est-ce pas là manifestement la raison pour laquelle tant d’enfants de Dieu ne connaissent pas la volonté de Dieu à l’égard de leur vie ? Tant qu’ils ne se sont pas consacrés, qu’ils n’ont pas offert leurs services, il ne peut leur montrer le travail qu’il a pour eux dans sa vigne, il serait déraisonnable de s’y attendre. Mais dès qu’ils présentent leurs corps en sacrifice vivant, mettant volonté, temps, capacités et talents à sa disposition, il est trop heureux de leur dévoiler son plan d’amour pour le ministère de la vie qui lui est offerte. «Si quelqu’un veut faire ma volonté, il connaîtra«.

Ministère.

Premièrement… au Seigneur, puis à nous.

A chacun des enfants qui se sont consacrés à lui, Dieu révèle d’abord le plan de sa vie, puis il l’y introduit, habituellement par un début insignifiant. Cela fut vrai pour les Macédoniens. Premièrement au Seigneur, à qui ils s’étaient donnés ; puis à nous pour l’œuvre qui devait leur être montrée. Dans ce cas, c’était simplement le secours à apporter aux saints. Cela est vrai pour nous tous. Voyez le cas de Paul : I1 commence par la question de la consécration : «Qui es-tu ?» et la réponse : «Je suis Jésus, je suis ton Seigneur». Puis vient la question du ministère : «Que veux-tu que je fasse ?» Et enfin la réponse, l’ordre de faire une chose bien simple : «Lève-toi, va dans la ville et là je te montrerai ce qu’il faut que tu fasses».

Prenez ensuite le cas de David. Représentez-vous le prophète entrant dans la maison du jeune berger pour l’oindre roi d’une grande nation. Quel honneur merveilleux pour un si jeune homme, d’être appelé dans l’obscurité de son humble métier pour devenir le chef de son peuple. Quel moment solennel pour le jeune David quand la main du prophète reposant sur lui, l’huile coula sur son front penché et que la conscience de la présence de l’Esprit de Dieu toucha son cœur d’une nouvelle grâce. Moment de consécration, de transformation et de révélation d’un plan de vie merveilleux, miséricordieux et étonnant. Nulle grande vision, pas de voix du ciel, point de buisson ardent. Nous pouvons nous le représenter se demandant à lui-même : «Est-ce bien la réalité ? Suis-je vraiment roi d’Israël ? Pourquoi me laisse-t-il ici ? Pourquoi ne me place-t-il pas sur le trône ? Pourquoi dois-je attendre ?» Puis il arriva quelque chose. Le jeune berger dut porter des provisions à ses frères au camp. Que cet incident paraît ordinaire et insignifiant. Et c’est justement par ce chemin que Dieu le conduisit à la place qui lui était destinée. C’était le premier échelon de l’échelle d’or qui devait l’amener sur le trône. Il rencontra ses frères, il entendit les insultes prétentieuses du géant, son cœur fut puissamment saisi par l’Esprit de Dieu, et nous savons ce qui s’en suivit.

Il en est de même pour nous. Nous consacrons nos vies à Dieu. Nous recevons paix, puissance et bénédiction. Mais il n’en résulte aucun changement sensible immédiat. Nous continuons à garder les moutons, à suivre la charrue, à être assis à notre pupitre, à poursuivre notre tâche quotidienne. Nous nous demandons ce que cela signifie. Dieu a-t-il vraiment une œuvre à nous faire faire ? Nous la montrera-t-il enfin ? Nous la fera-t-il trouver ? Puis il nous arrive quelque chose comme à David. Une porte s’ouvre pour le service, peut-être petite, modeste. Ce sera un banc à surveiller, une réunion à diriger, une humble place de service à remplir pour Dieu. Mais, à mesure qu’elle se présente, il y a maintenant dans notre cœur un zèle nouveau pour l’accomplir. Nous avons conscience d’un appel de Dieu, si humble soit-il. Instinctivement nous comprenons que la chose a plus d’importance pour notre vie que son insignifiance ne le donnerait à croire. Nous obéissons. Dieu bénit. Nous continuons. Les occasions se multiplient ; les bénédictions grandissent, le fruit apparaît ; la joie du service est en nous et peu à peu nous réalisons avec bonheur que Dieu nous conduit dans l’œuvre de notre vie.

Considérations finales.

Pour arriver à cet état de consécration et de soumission parfaite à la volonté de Dieu, il nous sera très utile de méditer quelques vérités du reste évidentes. Les voici :

Notre Dieu est un Dieu d’amour tendre, fervent, inaltérable et illimité Et parce qu’il est un Dieu d’amour illimité, il est digne d’une confiance illimitée.

Si cela n’est pas vrai, il n’y a plus de vérité dans l’univers ! Si l’Homme qui mourut pour nous ne nous aime pas parfaitement et n’est pas digne d’une confiance sans limites ni conditions, alors l’évangile de la grâce de Dieu est une fable et la confiance de ses rachetés n’est qu’un rêve. Si, au contraire, le Dieu de l’amour infini a droit à une confiance infinie, ne la lui accorderons-nous pas ? ou, à défaut, notre propre cœur ne nous condamnera-t-il pas ? Soyons honnêtes. Qu’est-ce qui trouble notre âme ? Doutons-nous de l’amour parfait de notre Dieu, et par conséquent de la confiance que nous pouvons avoir en lui ? S’il en est ainsi, confessons-le à notre honte. Ou bien, croyonsnous à son amour parfait et à sa fidélité à toute épreuve ? Alors accordons-lui la confiance et la soumission parfaite que cette foi réclame.

En outre, si Dieu est amour, sa volonté est certainement parfaite à l’égard de ses enfants. Le Saint-Esprit dit que cette volonté est parfaite (Rom 12:2). Il ne dit pas que nous voyons toujours qu’elle est parfaite, mais qu’elle l’est. Dès lors, elle est aussi parfaite quand nous ne la comprenons pas que quand nous la comprenons ; aussi parfaite quand elle nous paraît injuste et cruelle que quand elle nous semble juste et acceptable ; aussi parfaite quand le chemin est rude, pénible et ténébreux, que quand il est doux, aisé et lumineux. La question que nous pouvons poser est celle-ci : La volonté de Dieu, l’Amour incarné, est-elle ou non ce qu’il y a de mieux pour nous au monde ? Si oui, livrons-nous à elle ou reconnaissons que nous n’y tenons pas. Et si nous nous livrons à elle parce qu’elle est bonne et parfaite, ne reculons pas dès qu’il nous semble qu’elle ne l’est plus. Agir ainsi, c’est détrôner la foi et la remplacer par notre pauvre jugement.

Enfin, le Dieu qui est Amour est aussi souverain ; en sorte que tout ce qui arrive dans nos vies est ou envoyé, ou permis par lui. A cette affirmation, la raison prend le vertige et chancelle, mais la foi l’accepte tranquillement et calmement comme une vérité éternelle. Car c’est Dieu lui-même qui le déclare : «Toutes choses ensemble concourent au bien de ceux qui l’aiment». Non pas que toutes choses soient bonnes en elles-mêmes, car le mal n’est pas bien. Mais toutes choses concourent ensemble au bien de ceux qui l’aiment. D’une manière quelconque, Dieu fera contribuer même la colère de l’homme à sa louange. D’une manière ou d’une autre, il fera prévaloir sa justice sur toute injustice. Même le mal qui atteint ses enfants est selon sa volonté au moment où il les assaille. Nous ne pouvons saisir cela maintenant. Mais la foi se courbe sous sa main en acceptant joyeusement son assurance : «Ce que je fais maintenant, tu ne le sais pas, mais tu le sauras ci-après !» «Vous l’aviez pensé en mal, mais Dieu l’a pensé en bien», dit Joseph, en pleurant, à ses frères consternés. Le crime le plus atroce de toute l’histoire de l’humanité fut le crucifiement de celui dont Joseph fut le type. Il semblait que cela devait être le chef-d’œuvre de l’enfer, l’extinction finale de toute lumière dans le monde, la défaite définitive du Dieu de l’univers. Mais c’est de ce crime que découlent les bénédictions d’une rédemption qui glorifiera Dieu à travers tous les âges de l’éternité. «Ô profondeur des richesses, et de la sagesse et de la connaissance de Dieu ! Que ses jugements sont impénétrables et que ses voies sont incompréhensibles». Bien-aimés, Dieu est amour ; comme tel, il a droit à toute notre confiance ; sa volonté est nécessairement ce qu’il y a de meilleur pour nous ; et tout ce qui nous arrive est ou bien permis ou bien envoyé par lui ; – voilà les bases inébranlables de «la vérité qui est en Jésus-Christ». Sommes-nous à jamais fondés sur eux ? A leur pleine lumière, une soumission absolue à la volonté du Christ d’amour est d’abord intelligente et raisonnable, ensuite elle permettra à sa paix éternelle de garder nos cœurs au delà de toute pensée.

Permettez à l’auteur de rapporter ici, comme attestation de ces vérités, l’expérience remarquable d’une enfant de Dieu, à lui racontée par elle-même. Après avoir recherché avec ardeur pendant des années la plénitude de Christ, elle entra un jour dans une classe biblique dans une ville de l’intérieur du pays. Là, comme elle recevait avec avidité le message de vérité, Dieu donna à son âme altérée la parole dont elle avait besoin. Elle apprit que l’Esprit qu’elle demandait depuis des années était déjà venu habiter en elle. Elle comprit que ce que Dieu demandait, ce n’était pas une longue attente dans les supplications pour recevoir l’Esprit, mais une soumission absolue en toutes choses et pour toujours. Il ne s’ensuivit ni grande manifestation de puissance, ni ravissement extatique, ni vision merveilleuse de choses qui ne se peuvent exprimer. Mais son âme inquiète fut submergée de paix, de la paix inexprimable du Dieu de paix lui-même et son âme fut remplie de sa présence consciente en réponse à la consécration absolue de tout son être. Cette paix se maintint pendant les mois qui suivirent. L’abandon complet de sa vie à la volonté de Dieu avait fait descendre en son âme un océan de paix si profonde et si solide qu’aucun orage ne devait être capable de la troubler. Elle était ancrée en Christ. Et maintenant survint une épreuve qui lui démontra une fois pour toutes ce que Dieu est capable de faire avec une volonté soumise et un cœur fidèle.

«J’avais, dit-elle, un fils d’environ dix-huit ans. C’était un garçon ouvert et joyeux, un chrétien, mais ne vivant pas aussi près de Dieu que mon cœur l’eût désiré. Je l’avais remis à Dieu avec tout ce qui m’était cher lorsque je m’étais moi-même livrée à lui. Quand l’adversaire cherchait à troubler ma paix par des doutes à son sujet, j’élevais simplement mon cœur à Dieu en lui disant : «Seigneur, je te l’ai remis, que ta volonté soit faite dans sa vie». Un soir d’été, après être rentré, attiré par une musique qui jouait à proximité, il sortit pour en jouir, sans que je le susse. Se promenant en compagnie d’un autre jeune homme, ils échangèrent quelques mots de plaisanterie avec un homme qui se trouvait là et passèrent. Au moment où ils tournaient l’angle de l’allée suivante, cet homme sortit de l’ombre et tua net mon garçon d’un coup de feu. A minuit, on sonna à ma porte et le garde-police auquel j’ouvris me dit : «Madame, votre fils est sérieusement blessé, veuillez venir de suite». J’appelai mon mari et mon autre fils et me hâtai, ne sachant ce qui surviendrait. Tout ce dont je me souviens maintenant de cette course au milieu de la nuit, c’est que je me surpris élevant mon cœur à Dieu en répétant continuellement «Seigneur, je te l’ai remis, Seigneur, que ta volonté soit faite, que ce soit ta volonté qui s’accomplisse». Quand j’arrivai sur place, je m’agenouillai auprès du corps inerte, touchai sa face, saisis ses mains, soulevai sa tête, tandis que déjà mort, il gisait dans une mare de sang ! Quand le fait brutal nous fut révélé, mon mari s’évanouit ; l’autre de mes fils était accablé de douleur. Mais là, dans le silence de la nuit, à l’heure la plus solennelle de la vie d’une mère, j’appris ce que Dieu peut faire avec une volonté soumise et un cœur fidèle. Jamais je n’aurais cru possible que Dieu soutînt une âme faible et tremblante comme il le fit pour moi en cette heure affreuse. Quand je m’agenouillai près de mon fils assassiné, il me sembla que la source de la douleur était tarie. Je me sentais portée par des bras invisibles mais éternels. Une marée de paix ineffable couvrait mon âme et remplissait mon cœur d’un calme inexprimable que rien au monde, semblait-il, ne pourrait jamais détruire. Dès l’aube du jour, hommes et femmes se pressèrent dans ma maison et s’écrièrent : «De quel bois êtes-vous donc faite ? que pensez-vous donc ? comment expliquez-vous ce calme étrange qui semble vous posséder ? et je ne pus que répondre : «Ce n’est pas moi, c’est Christ, Christ !»

Ame troublée, ton chemin est-il sombre et Dieu semble-t-il être rude et dur dans les épreuves incompréhensibles qu’il a permises dans ta vie, si même il ne les a pas envoyées luimême ? Le fardeau te paraît-il si lourd que tu fléchisses sous son poids ? L’épreuve te paraîtelle si sombre que rien ne semble pouvoir l’éclairer ? la douleur si cuisante que rien ne puisse la calmer ? la blessure si profonde que rien ne puisse la guérir ? Alors souviens-toi que Dieu ne peut réaliser sa volonté dans nos vies que si notre soumission est absolue et notre confiance parfaite. Désirons-nous qu’il puisse réaliser cette volonté et atteindre son but suprême en nous ? Alors aucune affliction n’est excessive, jamais la fournaise n’est trop ardente, ni le prix trop élevé en comparaison de l’infinie bénédiction que nous valent une soumission entière et une confiance sans limite. Et puisque c’est à cette seule condition que Dieu peut agir parfaitement par nous, ce doit être celle qu’il cherche par-dessus tout à atteindre en nous. C’est heureux qu’il n’arrête pas la souffrance avant qu’elle ait accompli son œuvre. C’est ici précisément que l’amour du Père céleste dépasse l’amour des pères terrestres. Car nos parents terrestres nous épargneront souvent la souffrance par sympathie. Mais à la lumière de l’éternité, la manifestation la plus parfaite de l’amour paternel de Dieu se verra dans son refus de nous épargner nos souffrances les plus profondes, parce qu’en le faisant il eût supprimé le seul moyen de nous faire atteindre notre bonheur suprême.

[1] Apoc 1:6.

[2] (Triple Secret du Saint-Esprit, pages 66 et 67.)

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